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LA RÉPUBLIQUE

voir s’ils sont peureux, transporter nos guerriers, quand ils sont jeunes, au milieu d’objets effrayants, puis les relancer dans les plaisirs, eet les éprouver avec plus de soin qu’on n’éprouve l’or par le feu[1], pour savoir s’ils résistent aux séductions, s’ils gardent la décence en toute circonstance, s’ils sont de fidèles gardiens et d’eux-mêmes et de la musique dont ils ont reçu les leçons, s’ils règlent toute leur conduite sur les lois du rythme et de l’harmonie, s’ils, sont tels enfin qu’ils doivent être pour être le plus utiles à eux-mêmes et à l’État. Nous établirons chef et gardien de la cité celui qui, ayant subi toutes les épreuves successives de l’enfance, de la jeunesse et de l’âge mûr, en sera sorti intact ; nous le comblerons d’honneurs 414pendant sa vie et après sa mort, et nous lui érigerons des tombeaux et les monuments les plus glorieux à sa mémoire ; mais celui qui ne sera pas tel, nous l’exclurons. Voilà, Glaucon, ajoutai-je, pour me borner aux généralités, sans entrer dans les détails, comment je crois que nous devrons choisir et établir les chefs et gardiens.

Il me paraît à moi aussi, dit-il, que c’est la vraie façon de bprocéder.

Pour être exact, ne conviendrait-il pas d’appeler gardiens ces hommes qui gardent entièrement la cité, soit contre les ennemis du dehors, soit contre les amis du dedans, se chargeant d’ôter aux uns la volonté, aux autres le pouvoir de faire du mal, et de donner aux jeunes gens que nous appelions gardiens tout à l’heure le nom d’auxiliaires et d’exécuteurs des décisions des chefs ?

Il me le semble, dit-il.


Il faut faire croire
aux citovens
qu’ils sont frères.

XXI  Nous avons parlé il y a un instant de mensonges nécessaires. Comment nous y prendrons-nous pour faire croire un beau mensonge ctout d’abord aux magistrats eux-mêmes, et, si nous ne le pouvons, aux autres citoyens ?

  1. Il s’agit d’épreuves spéciales imposées aux gardiens. Il y en a trois espèces κλοπή, βία, γοητεία. De la première Platon ne donne aucun exemple ; mais on peut y rattacher les discours trompeurs des hommes d’État intéressés, des sophistes et des poètes. La chasse et la gymnastique donnaient matière aux épreuves de la seconde espèce (voir Lois 633 B). De la troisième, nous trouvons des exemples dans