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LA RÉPUBLIQUE IV

fin il ne laisse rien debout, ni dans la vie privée ni dans la vie publique.

Bon ! dis-je, tu crois que les choses se passent ainsi ? Je le crois, dit-il.

En conséquence, il faut, comme nous le disions en commençant, assujettir dès le début les jeux de nos enfants à une discipline plus rigoureuse, parce que, si le jeu et les enfants échappent à la règle, 425il est impossible qu’en grandissant les enfants deviennent des hommes de devoir et de vertu solide.

Comment pourrait-il en être autrement ? dit-il.

Quand donc les enfants auront été de bonne heure soumis à la règle dans leurs jeux et que la musique aura fait entrer dans leur cœur l’amour de la loi, au rebours de ces enfants mal dressés, il arrive que cet amour de la loi les suit dans toutes les circonstances de la vie, qu’il ne cesse de grandir et qu’il redresse tout ce qui a pu tomber de la vieille discipline.

C’est bien vrai, dit-il.


Ne légiférons pas
sur des minuties.

Et ces hommes, repris-je, retrouvent ces règles qui paraissent être des minuties, et que leurs devanciers avaient laissé entièrement dépérir.

Quelles règles ?

bCelles-ci : se taire, quand on est jeune, en présence des vieillards, comme la décence l’exige, les faire asseoir, se lever à leur approche, honorer ses père et mère, suivre l’usage pour la coupe des cheveux, les vêtements, les chaussures, toute la tenue extérieure, et toutes les choses du même genre[1]. Ne crois-tu pas qu’ils retrouveront tout cela ?

Si.

Il serait naïf, ce me semble, de légiférer là-dessus ; on ne le fait nulle part[2], et la parole et l’écriture seraient impuissantes à faire durer de telles prescriptions. Comment le pourraient-elles ?

On peut croire, Adimante, repris-je, que l’élan qui vient

  1. Cf. Aristophane, Nuées 961-1023, en particulier les vers 968, 993-4, 998.
  2. Lycurgue l’avait fait pourtant. V. Xénophon, République des Lacédémoniens III : « Lycurgue voulant imprimer fortement la modestie dans le cœur des jeunes gens, leur enjoignit de tenir dans les