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Page:Platon - Œuvres complètes, Tome 2, trad Dacier et Grou, 1869.djvu/288

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d’argile ou trois cotyles de vin que son fils lui-même ? Il faut dire alors que ce que nous aimons ce ne sont pas ces choses que nous recherchons en vue d’une autre, mais cette chose même en vue de laquelle nous nous attachons aux autres choses ; et, bien qu’il nous arrive de dire que nous aimons l’or et l’argent, rien n’est moins vrai, car ce que nous aimons c’est ce en vue de quoi nous attachons du prix à l’or, à l’argent, et à d’autres biens encore. Cela n’est-il pas vrai ? — Très-vrai. — Appliquons donc ce raisonnement à l’amitié, et disons que toutes les choses que nous appelons amies, en les aimant en vue d’une autre chose, ne méritent pas ce nom : il n’y a d’ami que ce principe auquel se rapportent toutes nos prétendues amitiés. — Il se peut bien qu’il en soit ainsi. — Donc, l’ami véritable n’est jamais aimé en vue d’un autre ami. — Cela est vrai.

« — Voilà donc qui est prouvé : l’ami n’est pas aimé en vue d’un autre ami. Mais n’aimons-nous pas le bon ? — Il me le semble. — Le bon est-il aimé à cause du mauvais ? Si, par exemple, de nos trois genres, le bon, le mauvais et ce qui n’est ni mauvais ni bon, il n’en restait que deux, et que le troisième, le mal, vînt à disparaître et ne s’attaquât plus ni au corps, ni à l’âme, ni à aucune de ces choses que nous avons appelées ni bonnes ni mauvaises, n’est-il pas vrai que le bon ne nous servirait plus à rien, et nous deviendrait tout à fait inutile ? Rien ne nous étant plus nuisible, en effet, nous n’aurions plus besoin d’aucun secours du bon. À ce compte, il serait tout à fait évident que c’est à