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Page:Platon - Œuvres complètes, tome 6, Dialogues dogmatiques II (trad. Dacier et Grou), 1869.djvu/58

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Tous les autres biens résultant de cet ordre de choses seraient infinis à raconter. Quant à ce qu’on rapporte de la facilité que les hommes avaient à se procurer la nourriture, en voici l’origine. Dieu lui-même conduisait et surveillait les hommes, tout comme ceux-ci aujourd’hui, à titre d’animaux d’une nature plus divine, conduisent les espèces inférieures. Sous ce gouvernement divin, il n’y avait ni cités, ni mariage, ni famille. Les hommes ressuscitaient tous du sein de la terre, sans aucun souvenir du passé. Étrangers à nos institutions, ils recueillaient sur les arbres et dans les forêts des fruits abondants, que n’avait pas fait naître la culture, et que la terre produisait par sa propre fécondité. Nus et sans abri, ils passaient presque toute leur vie en plein air : les saisons, tempérées alors, leur étaient clémentes, et l’épais gazon dont la terre se couvrait leur offrait des lits moelleux. Voilà, Socrate, tu viens de l’entendre, la vie que menaient les hommes sous Saturne. Celle à laquelle on dit que Jupiter préside, celle d’aujourd’hui, tu la connais par toi-même. Pourrais-tu décider quelle est la plus heureuse, et le voudrais-tu ?

LE JEUNE

SOCRATE

Non, vraiment.

L’ÉTRANGER

Veux-tu donc que je prenne ta place, et que je décide en quelque manière ?

LE JEUNE

SOCRATE

Je ne demande pas mieux.