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Page:Platon - Apologie de Socrate ; Criton ; Phédon (trad. Chambry), 1992.djvu/150

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encore discordants existent les premiers ; l’harmonie ne vient qu’après tout le reste et périt la première. Comment accorder ce langage avec ta première assertion ?

— C’est impossible, dit Simmias.

— Pourtant, reprit Socrate, s’il convient d’accorder ce qu’on dit, c’est bien quand on parle d’harmonie.

— Oui, en effet, dit Simmias.

— Or, reprit Socrate, il n’y a pas d’accord en ce que tu dis. Mais vois un peu laquelle des deux assertions tu préfères, celle que la science est réminiscence, ou celle que l’âme est une harmonie.

— C’est la première, Socrate, et de beaucoup, car l’idée de la deuxième m’est venue sans démonstration elle m’a paru vraisemblable et spécieuse, et c’est pour cette raison que la plupart des hommes la tiennent pour juste. Pour moi, j’ai conscience que les arguments qui fondent leurs démonstrations sur des vraisemblances sont des imposteurs, et que si l’on n’est pas en garde contre eux, ils vous abusent bel et bien, et en géométrie et en toute autre matière. Au contraire, l’argument relatif à la réminiscence et à la science a été établi sur une hypothèse qui mérite d’être admise. On a dit en effet que notre âme existait déjà avant d’entrer dans un corps de la même manière qu’existe son essence, désignée sous le nom de « ce qui est », et cette essence j’ai eu, j’en suis persuadé, parfaitement raison d’admettre qu’elle existe. Ces raisons me forcent, à ce qu’il me semble, à n’approuver ni moi ni personne qui soutiendrait que l’âme est une harmonie.

XLII. — Mais considérons la question, Simmias, dit Socrate, d’une autre façon. Crois-tu qu’il convienne à une harmonie ou à quelque autre composition de se comporter d’une autre manière que les éléments dont elle est composée ?

— Pas du tout.

— Il ne lui convient pas non plus, je pense, de rien faire ni de rien souffrir en dehors de ce que font et supportent ces éléments ?

— Il en convint.

— Il ne convient donc as que l’harmonie conduise les éléments dont elle a été formée, mais qu’elle les suive.

— Il fut de cet avis.

— Il s’en faut donc de beaucoup que l’harmonie ait des mouvements, des sons ou quoi que ce soit de contraire aux parties qui la composent.