Aller au contenu

Page:Platon - Sophiste ; Politique ; Philèbe ; Timée ; Critias (trad. Chambry), 1992.djvu/234

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

SOCRATE LE JEUNE

Quelles images ?

L’ÉTRANGER

Celle de l’excellent pilote et du médecin « qui vaut beaucoup d’autres hommes [18] ». Façonnons une similitude où nous les ferons figurer et observons-les.

SOCRATE LE JEUNE

Quelle similitude ?

L’ÉTRANGER

Celle-ci. Suppose que nous nous mettions tous en tête que nous souffrons de leur part d’abominables traitements, par exemple, que si l’un ou l’autre veut sauver l’un d’entre nous, l’un comme l’autre le sauve, mais que s’ils veulent le mutiler, ils le mutilent, en le taillant, en le brûlant, en lui enjoignant de leur verser, comme une sorte d’impôt, des sommes dont ils ne dépensent que peu ou rien pour le malade, et détournent le reste pour leur usage ou celui de leur maison. Finalement ils vont jusqu’à se laisser payer par les parents ou les ennemis du malade pour le tuer. De leur côté, les pilotes commettent mille autres méfaits du même genre ; ils vous laissent traîtreusement seuls à terre, quand ils prennent le large ; ils font de fausses manoeuvres en pleine mer et jettent les hommes à l’eau, sans parler des autres méchancetés dont ils se rendent coupables. Suppose qu’avec ces idées en tête, nous décidions, après en avoir délibéré, de ne plus permettre à aucun de ces deux arts de commander en maître absolu ni aux esclaves, ni aux hommes libres, de nous réunir nous-mêmes en assemblées, où l’on admettrait, soit le peuple tout entier, soit seulement les riches, et d’accorder aux ignorants et aux artisans le droit de donner leur avis sur la navigation et sur les maladies, et de décider comment il faut appliquer aux malades les remèdes et les instruments médicaux, comment il faut manoeuvrer les vaisseaux et les engins nautiques, soit pour naviguer, soit pour affronter les dangers du vent et de la mer pendant la navigation, ou les rencontres de pirates, et si, dans un combat naval, il faut opposer aux vaisseaux longs des vaisseaux du même genre ; enfin d’écrire ce que la foule aurait décidé à ce sujet, soit que des médecins et des pilotes ou que des ignorants aient pris part aux délibérations, sur des tables tournantes [19] ou sur des colonnes, ou bien, sans l’écrire, de l’adopter à titre de coutumes ancestrales et de nous régler désormais sur toutes ces décisions pour naviguer et pour soigner les malades.

SOCRATE LE JEUNE

Ce sont des choses bien étranges que tu dis là.