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Page:Platon - Sophiste ; Politique ; Philèbe ; Timée ; Critias (trad. Chambry), 1992.djvu/465

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dès le jeune âge reçu de leçons qui puissent guérir le mal, c’est ainsi que tous ceux de nous qui sont méchants le deviennent par deux causes tout à fait indépendantes de leur volonté, et il faut toujours en accuser les pères plutôt que les enfants, les instituteurs plutôt que les élèves. Mais il faut s’appliquer de toutes ses forces, et par l’éducation et par les moeurs et par l’étude, à fuir le vice et à atteindre la vertu, son contraire. Toutefois, c’est là un sujet d’un autre ordre.

En regard de ces considérations, il est naturel, il est à propos d’exposer par quels moyens on soigne et conserve les corps et les esprits ; car mieux vaut insister sur le bien que sur le mal. Or tout ce qui est bon est beau et le beau n’est jamais disproportionné. Il faut donc poser en principe qu’un animal, pour être beau, doit avoir de justes proportions. Mais ces proportions, nous ne les percevons et n’en tenons compte que dans les petites choses ; dans les plus importantes et les plus considérables, nous ne nous en avisons pas. Par exemple, en ce qui concerne la santé et les maladies, la vertu et le vice, il n’y a pas de proportion ou de disproportion qui importe plus que celles qui s’établissent particulièrement entre l’âme et le corps. Cependant nous n’y faisons pas attention et nous ne réfléchissons pas que, quand une âme forte et grande à tous égards a pour véhicule un corps trop faible et trop chétif, ou que les deux sont assortis dans le rapport inverse, l’animal tout entier manque de beauté, puisqu’il est mal proportionné, alors que la proportion est de première importance, tandis que l’état contraire est pour celui qui sait le discerner le plus beau et le plus aimable de tous les spectacles. Par exemple, si un corps a les jambes trop longues ou quelque autre membre disproportionné, non seulement il est disgracieux, mais encore, si ce membre prend part avec d’autres à quelque travail, il éprouve beaucoup de fatigues, beaucoup de mouvements convulsifs ; il va de travers et tombe et se cause à lui-même mille souffrances. Concevons bien qu’il en est de même de cet être double que nous appelons animal. Quand l’âme est en lui plus forte que le corps et qu’elle est en proie à quelque passion, elle secoue le corps entier par le dedans et le remplit de maladies ; quand elle se livre avec ardeur à certaines études et à certaines recherches, elle le consume ; si elle entreprend d’instruire les autres et s’engage dans des combats de parole en public et en particulier, elle l’enflamme et l’ébranle par les querelles et les rivalités qui s’ensuivent, et y provoque des catarrhes qui donnent le change à ceux qu’on appelle des médecins et leur fait attribuer le mal à des causes imaginaires. Si c’est au contraire un corps grand et supérieur à l’âme qui est uni à une intelligence petite et débile, comme il y a naturellement dans l’homme deux sortes de désirs, ceux du corps