Page:Platon - Théétète. Parménide, trad. Chambry.djvu/103

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

que tu te comportes ; quiconque s’approche de toi, tu ne le lâches pas que tu ne l’aies forcé à quitter ses vêtements pour lutter en paroles contre toi.

SOCRATE

Tu as dépeint on ne peut mieux ma maladie, Théodore ; mais je suis plus fort que ces deux lutteurs ; car j’ai déjà rencontré des milliers d’Héraclès et de Thésées, redoutables dans la dispute, qui m’ont bel et bien battu ; mais je ne m’arrête pas pour cela, tant est violent et enraciné l’amour que j’ai pour cette sorte de gymnastique. Ne m’envie donc pas, toi non plus, le plaisir d’un corps à corps, dont tu tireras profit aussi bien que moi.

THÉODORE

Je ne dis plus rien là-contre : mène-moi par où tu voudras. De toute façon, il me faut subir la destinée que tu m’as filée relativement à cette dispute et me soumettre à ta critique. Mais je ne pourrai pas me livrer à toi au-delà de ce que tu m’as proposé.

SOCRATE

Il suffit que tu me suives jusque-là. Et prends bien garde à une chose, de ne pas donner à nos arguments une forme enfantine, sans nous en douter, de peur qu’on ne nous en fasse encore un reproche.

THÉODORE

J’y tâcherai, autant que j’en suis capable.

SOCRATE

XXII. — Reprenons donc d’abord une question déjà traitée et voyons si notre mécontentement était ou non justifié, quand nous avons désapprouvé la proposition suivant laquelle chacun se suffit à lui-même en fait de sagesse. Protagoras nous a alors accordé que certains hommes discernaient mieux que les autres le meilleur et le pire, et que ceux-là étaient sages. N’est-ce pas vrai ?

THÉODORE

Si.

SOCRATE

S’il était ici et nous faisait lui-même cet aveu, et si ce n’était pas nous qui, pour le défendre, ayons fait cette concession pour lui, nous n’aurions plus besoin d’y revenir pour la renforcer. Mais on peut nous objecter que nous n’avons aucune autorité pour faire cet aveu en son