Page:Plaute, Térence, Sénèque - Théâtre complet, Nisard.djvu/676

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arbitre que vous voudrez, (125) et je vous ferai voir que c’est vous qui avez tort.

DE. Mon Dieu ! apprenez donc à être père de ceux qui le sont réellement.

MI. Si la nature vous a fait son père, moi, je le suis par l’éducation.

DE. Par l’éducation ? vous ?

MI. Ah ! si vous continuez, je m’en vais.

DE. Voilà comme vous êtes !

MI. Mais aussi pourquoi me répéter cent fois la même chose ?

DE. (130) C’est que cet enfant me préoccupe.

MI. Et moi aussi, il me préoccupe. Voyons, mon frère, occupons-nous chacun pour notre part, vous de l’un, moi de l’autre. Car vous occuper de tous les deux, c’est pour ainsi dire me redemander celui que vous n’avez donné.

DE. Ah ! Micion.

MI. Je le pense ainsi.

DE. Comment donc ! Puisque cela vous plaît, (135) qu’il dissipe, qu’il jette l’argent parla fenêtre, qu’il se perde ! cela ne me regarde point. Si je vous en parle jamais….

MI. Voilà que vous recommencez, mon frère.

DE. Croyez-vous donc…. Moi, vous redemander celui que je vous ai donné ? Mais tout cela me fâche : je ne suis pas un étranger pour lui. Si je m’oppose… Bah ! en voilà assez. Vous voulez que je ne m’occupe que du mien ? D’accord. Et je rends grâces aux dieux (140) de ce qu’il est tel que je le désire. Quant au vôtre, il sentira lui-même par la suite… Je n’en veux pas dire davantage.

SCENE III (Micion seul)

Si tout n’est pas vrai dans ce qu’il dit, tout n’est pas faux, et cela ne laisse pas que de me chagriner un peu ; mais je n’ai pas voulu qu’il pût s’en douter. Car voilà notre homme : (145) pour le calmer, il faut absolument lui rompre en visière et crier plus fort que lui. Encore a-t-il bien de la peine à s’humaniser. Si je l’excitais, ou si je me prêtais le moins du monde à sa mauvaise humeur, je serais aussi fou que lui. Pourtant Eschine a bien quelques torts envers nous dans tout ceci. (150) Est-il une courtisane qu’il n’ait pas aimée, qui n’ait pas eu de son argent ? Dernièrement enfin, dégoûté sans doute de toutes ces femmes, il me dit qu’il voulait se marier. J’espérais que le jeune homme avait jeté son feu ; je m’en applaudissais. Et voilà que de plus belle… (155) Mais je veux savoir au juste ce qu’il en est, et joindre mon drôle, si je le trouve sur la place.


ACTE DEUXIEME

SCENE I (Samnion, Eschine, Parménon, Callidie, ces deux derniers personnages étant muets)

SA. A l’aide, citoyens ! venez au secours d’un malheureux, d’un innocent ; protégez sa faiblesse.

AE. (à Callidie) Vous pouvez maintenant rester ici en toute sûreté. Pourquoi tourner ainsi la tête ? Vous n’avez rien à craindre ; tant que je serai là, il n’osera pas vous toucher.

SA. Moi ? quand vous seriez tous contre moi, je la…..

AE. (160) Tout maraud qu’il est, il ne s’exposera pas d’aujourd’hui à se faire rosser une seconde fois.

SA. Écoutez, Eschine ; afin que vous ne veniez pas prétexter plus tard votre ignorance, je suis marchand d’esclaves.

AE. Je le sais.