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Page:Plaute, Térence, Sénèque - Théâtre complet, Nisard.djvu/758

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mon impuissante colère, et fait tourner ma haine à sa gloire. En lui imposant ces rudes travaux, moi-même j’ai prouvé son origine ; sa renommée est mon ouvrage. Des lieux où le soleil commence aux lieux où il Unit son cours, et de ses feux rapprochés noircit les habitants des deux Éthiopies, cette valeur mdomptable a des autels ; on adore Hercule comme un dieu. Les monstres vont manquer à la fin. Moins en peine d’exécuter que moi de prescrire, il reçoit mes ordres avec joie. Quel caprice de tyran pourrait mettre en péril un héros de cette trempe.’Les monstres qu’il a vaincus. Hercule s’en fait des armes, et marche à de nouveaux combats, renforcé des terreurs de l’hydre et du lion de Némée. La terre ne lui suflisait plus : son bras a forcé la barrière du Téiiare, elle voilà revenu au jour, triomphant des enfers et chargé de leurs dépouilles opimes. C’est peu d"en être revenu, il a violé le pacte fait avec le Jupiter de l’Érèbe. J’ai vu, oui j’ai vu de mes yeux ce vainqueur de la nuit et de la puissance infernale offrant à son père le trophée insolent de la dépouille fraternelle. A quoi tenait-il qu’il ne traînât, détrôné et chargé de chaînes à sa suite un dieu traité d’égal avec Jupiter dans le partage de la toute— puissance ? que lui-mênie, prenant possession du Tartare, il ne forçât le Styx à couler sous la voûte descieux ? Du moins a-t-il montré la voie de retour aux mânes, et mis à nu le sanctuaire de la mort. A présent il me brave ; il parcourt la Grèce de ville en ville, promenant par dérision le terrible gardien des ombres. A cet aspect le jour a pâli, le soleil a reculé d’horreur ; et moi-même, saisie d’effroi en voyant la triple tête du monstre captif, j’ai frémi de l’ordre que j’avais donné.

Craintes frivoles ! c’est le ciel même qui est menacé. Le vainqueur de l’enfer ne peut-il envahir l’Olympe ? Il ravira le sceptre à son père. Pour s’élever jusqu’aux astres, il dédaignera la voie lente qu’a suivie Bacchus ; il voudra y monter d’assaut, en marchant sur des ruines, et faire du monde une solitude, afin d’y régner sûrement. Le superbe a senti sa force ; et pourtant le ciel a compris qu’il pouvait s’en rendre maître. Toute cette masse immense n’a pu le faire plier:ses épaules ont soutenu, sans fléchir sous un tel fardeau, le pôle avec les étoiles et le firmament, et moi-même qui pressais la charge de mon poids.

Oui, c’est au ciel que tend son ambition. Eh bien, poursuis, ma colère. Préviens ses attentats. La lutte est corps à corps. Déchire-le de tes propres mains. Plus de mandataires de ma vengeance ! plus de monstres ! Laissons là Eurysthée, désormais à bout de ses exigences. Déchaînons contre Hercule ces Titans qui osèrent bien attaquer la puissance suprême ! Ouvrons la caverne de l’Etna ! Que le géant qui ébranle la terre de Doris relève sa tête effroyable ! Que la lune lance de nouveaux monstres sur la terre ! Mais quoi ! il les a tous vaincus ! Quel adversaire opposer à Hercule, si ce n’est Hercule lui-même ? Qu’il se fasse donc la guerre ; qu’échappées des gouffres du Tartare, les Euménides accourent, agitant sur lui leur chevelure enflammée ; qu’elles le flagellent sans relâche de leurs cruelles vipères. Va maintenant, superbe ! Porte tes prétentions jusqu’au ciel; regarde la terre en pitié. Tu t’applaudis d’avoir échappé au Styx, à la colère des mânes : ici tu vas retrouver les enfers. Du fond des abîmes, delà nuit j’appellerai la déesse de la discorde : à ma voix elle sortira de la caverne qui la recèle par de là le lieu d’exil des coupables. J’évoquerai l’arrière-ban des enfers, le Crime odieux,