ÉPIDIQUE. C’est Vulcain, sans doute, qui avait fabriqué les armes de Stratippoclès, puisque d’elles-mêmes elles ont volé à l’ennemi. Pour lui, ce beau fils de Thétis, qu’il les perde, soit, les Néréides lui en apporteront d’autres. Seulement la matière pourrait finir par manquer aux armuriers, si à chaque campagne il se dépouille en faveur de l’ennemi.
THESPRION. Brisons là-dessus.
ÉPIDIQUE. N’en parle donc plus.
THESPRION. Toi-même, ne me questionne plus.
ÉPIDIQUE. Allons, où est Stratippoclès ?
THESPRION, Il a eu ses raisons pour ne pas oser venir ici avec moi.
ÉPIDIQUE. Qu’y a-t-il ?
THESPRION. Il ne veut pas encore que son père le voie.
ÉPIDIQUE. Pourquoi ?
THESPRION. Voici. Il a acheté à la vente du butin une jeune fillette, jolie et de bonne mine.
ÉPIDIQUE. Qu’entends-je ?
THESPRION. Ce que je te dis.
ÉPIDIQUE. Pourquoi l’a-t-il achetée ?
THESPRION. Pour contenter son cœur.
ÉPIDIQUE. Eh ! combien a-t-il donc de cœurs, cet homme-là ? Quand il est parti pour se rendre à l’armée, il m’a chargé d’acheter au marchand d’esclaves une joueuse de lyre qu’il aimait ; j’ai fait sa commission.
THESPRION. Du côté où souffle le vent on tourne la voile, mon cher É Epidique.
ÉPIDIQUE. Ah ! malheureux ! il m’a perdu !
THESPRION, Comment cela ? Qu’y a-t-il ?
ÉPIDIQUE. Ça, cette femme qu’il a achetée, combien l’a-t-il payée ?
THESPRION. Pas cher.
ÉPIDIQUE. Ce n’est pas cela que je te demande.
THESPRION. Quoi donc ?
ÉPIDIQUE. Combien de mines ?
THESPRION, indiquant la somme avec ses doigts. Voilà.
ÉPIDIQUE. Quarante mines !
THESPRION. Et cet argent, il l’a emprunté à un usurier de Thèbes, pour une double drachme d’intérêt par mine et par jour.
ÉPIDIQUE. Ciel !
THESPRION. Et l’usurier est arrivé avec lui pour avoir son argent.