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SCÈNE VI. — MILPHIDIPPE, ACROTÉLEUTIE, PYRGOPOLINICE, PALESTRION.


MILPHIDIPPE. Maîtresse, voici le militaire.

ACROTÉLEUTIE. Où est-il ?

MILPHIDIPPE. A gauche ; regardez, mais du coin de l’œil, pour qu’il ne sache pas qu’on le voit.

ACROTÉLEUTIE. Je le vois : par Pollux, c’est le moment de redoubler de malice.

MILPHIDIPPE. A vous de commencer.

ACROTÉLEUTIE. Dis-moi, as-tu parlé à lui-même ? (Bas.) Ne ménage pas ta voix, pour qu’il puisse entendre.

MILPHIDIPPE. J’ai parlé à lui-même, par Pollux, moi-même, tout tranquillement, tant que cela m’a fait plaisir, à mon loisir, à ma fantaisie, comme j’ai voulu.

PYRGOPOLINICE. Entends-tu ce qu’elle dit ?

PALESTRION. J’entends ; est-elle assez joyeuse de vous avoir approché !

ACROTÉLEUTIE. L’heureuse créature !

PYRGOPOLINICE. Comme on parait m’aimer !

PALESTRION. Cela vous est bien dû.

ACROTÉLEUTIE. Par Castor, tu m’étonnes quand tu dis que tu lui as parlé, que tu l’as prié. On dit qu’il faut s’adresser à lui par lettre ou par ambassadeur, comme à un roi.

MILPHIDIPPE. Eh ! ma foi, j’ai eu de la peine à obtenir audience.

PALESTRION. Quelle réputation vous avez auprès du beau sexe !

PYRGOPOLINICE. Je m’y résignerai, puisque Vénus le veut.

ACROTÉLEUTIE. Je rends grâce à Vénus ; je la prie, je la conjure de m’accorder celui que j’aime, que je désire ; puisse-t-elle me le rendre favorable, l’empêcher de repousser mes vœux !

MILPHIDIPPE. Je l’espère, quoique bien des femmes brûlent pour lui ; il les dédaigne et les éloigne toutes ; vous seule faites exception.

ACROTÉLEUTIE. Aussi, comme je connais son goût difficile, je tremble, quand il m’aura vue, que ses yeux ne le fassent changer d’avis et que son extrême beauté ne le porte à mépriser ma figure.

MILPHIDIPPE. Cela ne sera pas, ayez confiance.

PYRGOPOLINICE. Comme elle se rabaisse elle-même !