Page:Plaute - Comédies, traduction Sommer, 1876, tome 2.djvu/192

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DORDALE. Eh, ma foi, j’ai peur. J’ai déjà été pris plus d’une fois, et j’ai trop d’expérience pour aller me jeter dans le bourbier.

TOXILE. Je ne vois là aucun danger.

DORDALE. Je le sais, mais j’ai peur.

TOXILE. Ce n’est pas mon affaire ; je t’en parle dans ton intérêt, pour te mettre le premier à même de profiter de l’occasion.

DORDALE. Grand merci ; mais il vaut mieux s’instruire aux dépens des autres que d’instruire les autres à ses dépens.

TOXILE. Tu crains qu’on ne vienne la réclamer du fin fond de la Barbarie ? Allons, achète.

DORDALE. Encore faut-il voir la marchandise.

TOXILE. C’est juste ; mais voici l’étranger, le porteur de la lettre, qui arrive tout à point.

DORDALE. C’est lui ?

TOXILE. Oui.

DORDALE. Et c’est là cette jeune fille enlevée ?

TOXILE. J’en sais autant que toi, seulement j’ai des yeux. Eh, ma foi, qu’elle soit ce qu’elle voudra, elle est fort belle.

DORDALE. Un minois assez gentil.

TOXILE. Le bourreau, quel dédain ! Examinons sa figure sans rien dire.

DORDALE. Bonne idée. (Ils vont à l’écart.)


SCÈNE IV. — SAGARISTION, LA JEUNE FILLE, TOXILE, DORDALE.


SAGARISTION. Eh bien, Athènes ne vous semble-t-elle pas une heureuse et opulente cité ?

LA JEUNE FILLE. J’ai vu l’extérieur de la ville, mais je n’ai guère pu étudier les mœurs des habitants.

TOXILE, à Dordale. N’a-t-elle pas débuté là par une parole sensée ?

DORDALE. Je ne peux pas juger de sa sagesse comme cela, sur un premier mot.

SAGARISTION. Et d’après ce que vous avez vu, la place vous a-t-elle paru forte ?

LA JEUNE FILLE. Elle est assez forte si elle est habitée par d’honnêtes gens, si on a banni la Perfidie, la Corruption, l’Avarice, puis l’Envie, puis l’Ambition, puis la Calomnie, puis le Parjure.

TOXILE. Bravo !