Page:Plaute - Comédies, traduction Sommer, 1876, tome 2.djvu/356

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pêcheur prendre un poisson valise ou l’apporter sur la place ? Tu ne seras pas en droit de faire ici tous les métiers qu’il te plaira : tu prétends, maraud, être à la fois pêcheur et layetier. Il faut ou me montrer ce que c’est qu’un poisson valise, ou ne pas emporter ce qui n’est pas un produit de la mer et n’a pas d’écailles.

GRIPUS. Comment ! tu n’as jamais entendu parler du poisson valise ?

TRACHALION. Scélérat ! il n’y en a pas.

GRIPUS. Si fait : je le sais bien, moi qui suis pêcheur ; il est vrai qu’on en prend rarement, c’est celui qu’on tire le moins souvent à terre.

TRACHALION. Chansons ! tu veux m’en donner à garder, pendard. De quelle couleur est-il ?

GRIPUS. On en pêche très-peu de la couleur de celui-ci ; mais il y en a d’autres qui ont la peau rouge, et encore de grands qui sont noirs.

TRACHALION. Je sais ; mais toi, par Hercule, tu te changeras en poisson valise, si tu n’y prends garde : on te fera d’abord la peau rouge, et ensuite noire.

GRIPUS. La sotte rencontre que j’ai faite aujourd’hui !

TRACHALION. Nous bavardons, le temps passe. Vois, si tu veux, quel arbitre nous prendrons.

GRIPUS. La valise.

TRACHALION. Vraiment ? tu es fou.

GRIPUS. Salut, Thalès !

TRACHALION. Tu ne l’emporteras pas avant de choisir un dépositaire ou un arbitre qui décidera la chose.

GRIPUS. Es-tu dans ton bon sens ?

TRACHALION. Je suis un buveur d’ellébore.

GRIPUS. Et moi un furieux ; mais je ne la lâcherai pas.

TRACHALION. Ajoute un mot seulement, et je t’enfonce mes poings dans le crâne. Si tu ne lâches pas, je te presserai comme un pinceau neuf et te ferai sortir la dernière goutte de sang.

GRIPUS. Touche, et je te couche à terre comme un polype. Veux-tu te battre ?

TRACHALION. À quoi bon ? partage plutôt le butin.

GRIPUS. Tu n’emporteras d’ici que des coups ; ne réclame donc rien. Moi, je quitte la place.

TRACHALION. Et moi je vire de bord pour t’empêcher de t’en aller ; reste.