Page:Plaute - Comédies, traduction Sommer, 1876, tome 2.djvu/388

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les restes ? Il faut que tout cela se vende au plus vite, que j’en offre la dime à Hercule[1].

CROCOTIE, à part. Par Castor, voilà une vente qui ne vaut pas grand’chose ! La faim lui est descendue jusqu’aux talons. Parlons-lui.

GÉLASIME. Qui est-ce qui vient là à ma rencontre ? Eh ! c’est Crocotie, la servante d’Épignome.

CROCOTIE. Bonjour, Gélasime.

GÉLASIME. Je ne m’appelle pas comme cela.

CROCOTIE. C’était pourtant bien votre nom.

GÉLASIME. Parfaitement, mais je ne l’ai plus, il est usé ; mon véritable nom à présent est Mange-Peu.

CROCOTIE. Ah, ah ! vous m’avez bien fait rire aujourd’hui, allez !

GÉLASIME. Quand cela ? où ?

CROCOTIE. Ici même, quand vous annonciez une vente…

GÉLASIME. Coquine, tu as donc écouté ?

CROCOTIE. Bien digne de vous.

GÉLASIME. Où vas-tu ?

CROCOTIE. Chez vous.

GÉLASIME. Pourquoi ?

CROCOTIE. Panégyris me charge de vous prier instamment de vous en venir la trouver avec moi.

GÉLASIME. J’y vais, ma foi, au plus vite. Les viandes sont-elles cuites ? combien a-t-elle offert d’agneaux ?

CROCOTIE. Elle n’a pas fait de sacrifice.

GÉLASIME. Comment ? Que me veut-elle alors ?

CROCOTIE. Il s’agit, je crois, d’un emprunt de dix boisseaux de blé.

GÉLASIME. Que je lui emprunterai ?

CROCOTIE. Non, ma foi, que vous nous prêterez.

GÉLASIME. Dis-lui que je n’ai rien à donner ni à prêter, pas un radis ni quoi que ce soit, excepté le manteau que voici, et une langue qui est à vendre.

CROCOTIE. Ah, ah ! vous n’avez pas de langue pour dire : Je donnerai ?

GÉLASIME. J’en avais une vieille ; je m’en suis défait ; celle-ci ne sait dire que : Donnez.

CROCOTIE. La peste soit de vous !

GÉLASIME. Elle sait encore t’en dire autant.

  1. On offrait à Hercule la dîme du butin.