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ACTE IV.


SCÈNE I. — CHARMIDE.


Roi des plaines salées, frère tout-puissant du Jupiter qui règne dans les cieux, c’est d’un cœur content et joyeux que je te rends gloire, que j’adresse des actions de grâces à toi et à ces flots amers, qui, maîtres absolus de ma personne et de mes biens, permettent que je t’échappe pour rentrer dans ma patrie, dans les murs de ma ville natale. Je te remercie, 6 Neptune, et de tous les dieux, c’est à toi que j’ai les plus grandes obligations. Tout le monde dit que tu es rigoureux, cruel, d’un caractère avide, orageux, sauvage, insupportable, violent ; j’ai éprouvé tout le contraire : oui, par Pollux, au milieu même de ton empire, je t’ai trouvé doux et clément, toujours tel que je te souhaitais. Déjà ce que les hommes répètent à ta louange était venu jusqu’à mes oreilles : tu épargnes les pauvres, disent-ils, ce sont les riches que tu condamnes et que tu perds. C’est bien, je t’en fais compliment ; tu sais traiter chacun selon son mérite. Il est digne des dieux de ménager l’indigent. Tu m’as été fidèle, toi que l’on proclame perfide : car sans toi, je le sais, tes satellites auraient enlevé, emporté sur la haute mer le malheureux Charmide, et auraient dispersé mes biens avec mes membres à travers les plaines azurées. Déjà, semblables à une meute, les vents furieux entouraient le navire ; la pluie, les vagues, les ouragans ennemis s’apprêtaient à briser le mât, à jeter bas les antennes, à déchirer les voiles, si ta sérénité protectrice n’eût veillé sur moi. De grâce, séparons-nous ; désormais je suis résolu à m’abandonner au repos ; j’ai assez de biens. Contre quelles misères n’ai-je pas lutté pour amasser des richesses à mon fils ! Mais quel est cet homme qui entre sur la place avec un accoutrement et une figure si étranges ? par Pollux, j’ai grande envie de revoir ma maison, mais je veux observer d’ici ce qu’il va faire.


SCÈNE II. — LE SYCOPHANTE, CHARMIDE.


LE SYCOPHANTE. J’appellerai cette journée la journée des trois deniers ; car j’ai loué mes services trois deniers pour faire un