Page:Plaute - Comédies, traduction Sommer, 1876, tome 2.djvu/474

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SCENE III. — DINARQUE, ASTAPHIE.


DINARQUE. Les poissons, qui passent leur vie à se baigner, sont moins longtemps au bain que cette Phronésie. Si les femmes se laissaient aimer tant qu’elles restent dans la baignoire, tous les amants se feraient baigneurs.

ASTAPHIE. Ne pouvez-vous pas patienter, attendre un moment ?

DINARQUE. Eh, malheureux, je suis las de patienter.

ASTAPHIE. Et moi aussi, je suis tellement lasse qu’il me faut un bain.

DINARQUE. De grâce, Astaphie, entre, dis que je suis là ; va vite, fais-lui entendre qu’elle s’est assez baignée.

ASTAPHIE. Je le veux bien.

DINARQUE. Écoute encore.

ASTAPHIE. Qu’est-ce ?

DINARQUE. Que les dieux m’exterminent pour t’avoir rappelée ! Je n’avais rien à te dire. Va seulement.

ASTAPHIE. Pourquoi me rappeler alors, méchant vaurien ? Ce retard vous retarde de mille pas. (Elle s’en va.)

DINARQUE. Pourquoi est-elle restée si longtemps à la porte ? Elle attendait je ne sais qui, probablement le militaire. C’est cela : voyez si elles ne sont pas comme les vautours, qui flairent la proie trois jours à l’avance. Elles soupirent après lui, elles ne pensent qu’à lui. Quand il sera arrive, on ne me regardera pas plus que si j’étais mort depuis deux cents ans… Qu’on est heureux de ne songer qu’à sa fortune ! Malheur à moi ! je m’amende trop tard, j’ai gaspillé mon bien. Mais à présent, s’il me tombait un bel et riche héritage, à présent que je sais tout ce qu’il y a dans l’argent d’amertume et de douceur, je le garderais si bien, je vivrais avec tant d’économie, que… au bout de quelques jours il n’y aurait plus rien. Je clorais le bec a ceux qui disent du mal de moi aujourd’hui. Mais assez de paroles ; je l’entends s’ouvrir, cette porte qui dévore tout ce qui passe de l’autre côté des verrous.


SCÈNE IV. — PHRONÉSIE, DINARQUE.


PHRONÉSIE. Croyez-vous, dites-moi, que ma porte va vous mordre, et craignez-vous d’entrer, mon cher cœur ?

DINARQUE. Voyez ce printemps ! comme elle est toute fleurie ! quel parfum ! quelle brillante fraîcheur !