Page:Pline l'ancien - Histoire naturelle, Littré, T1 - 1848.djvu/224

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Essédons; sur la côte, jusqu'au Tanaïs, les Maeotes, qui ont donné leur nom au Palus, et à l'extémité, derrière eux, les Arimaspes; puis les monts Riphées, la région appelée Ptérophore à cause de la chute perpétuelle de la neige, dont les flocons ressemblent à des plumes, partie du monde condamnée par la nature, plongée dans d'épaisses ténèbres, et ne servant qu'à produire le froid et à recéler l'Aquilon glacial.

[11] Derrière ces montagnes et au delà de l'Aquilon, une nation heureuse, si on en croit les récits, appelée les Hyperboréens, et où les hommes atteignent une grande vieillesse; des merveilles fabuleuses en sont racontées : on dit que là sont les gonds du monde et la dernière limite de la révolution des astres: le soleil y donne une lumière de six mois et un seul jour, et il se cache non, comme des ignorants l'ont dit, de l'équinoxe du printemps à celui de l'automne; mais il n'y a dans l'année qu'un lever au solstice d'été, qu'un coucher au solstice d'hiver (15). La contrée est bien exposée, d'une température heureuse, et exempte de tout souffle nuisible.

[12] Les habitants ont pour demeures les forêts et les bois sacrés; le culte des dieux est célébré et par les individus et par le peuple; la discorde y est ignorée, ainsi que toute maladie. On n'y meurt que par satiété de la vie : après un repas, après des jouissances données aux dernières heures de la vieillesse, on saute dans la mer du haut d'un certain rocher; c'est pour eux le genre de sépulture le plus heureux. Quelques-uns les ont placés non en Europe, mais aux extrémités des rivages asiatiques, parce qu'on y trouve un peuple, les Attacores VI, 20), qui n'en diffère guère par les habitudes et la position.

[13] D'autres ont attribué aux Hyperboréens une situation intermédiaire entre l'un et l'autre soleil, là ou l'astre se couche pour les Antipodes et se lève pour nous, ce qui ne peut être, à cause de la vaste mer qui est entre deux. Les auteurs qui ne les admettent que là où le jour est de six mois disent qu'ils sèment le matin, moissonnent à midi, récoltent au coucher du soleil les productions des arbres, et pendant la nuit se cachent dans des cavernes. On ne peut guère douter de l'existence de cette nation, car trop d'écrivains rapportent qu'ils étaient dans l'usage d'envoyer les prémices des fruits dans l'île de Délos à Apollon, qu'ils honoraient particulièrement.

[14] Les prémices étaient apportées par des vierges, respectées et accueillies hospitalièrement pendant quelques années par les nations intermédiaires; puis, des violences ayant été commises contre les messagères, les Hyperboréens se décidèrent à déposer ces offrandes sur la frontière des peuples limitrophes: ceux-ci les portaient à leurs voisins, et ainsi de suite jusqu'à Délos. Plus tard, cela même tomba en désuétude. La Sarmatie, la Scythie, la Tauride, et toute la région à partir du Borysthène, a de long 980.000 pas et de large 717.000, suivant Agrippa. Pour moi, je pense que, dans cette portion de la terre, les mesures sont incertaines.

XXVIl. [1] Mais, suivant notre plan accoutumé, énumérons ce qui reste dans ce golfe; nous avons dejà parlé de ses mers. (XIII.) L'Hellespont n'a pas en Europe d'îles qui méritent d'être nommées. Dans le Pont-Euxin il y en a deux à 1.500 pas de l'Europe, à 14.000 de l'ouverture du détroit : on les appelle Cyanées ou Symplégades. La fable rapporte qu'elles se heurtaient l'une contre l'autre : c'est que, séparées par un intervalle étroit, on ne les voit distinctes que de face en entrant dans le Pont-Euxin, et qu'elles semblent s'être réunies pour peu que les yeux aient