Page:Pline le Jeune - Panégyrique de Trajan, trad. Burnouf, FR+LA, 1845.djvu/109

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

mier pour le prince ? car si vous êtes entré au second déjà empereur, c’était sous un empereur aussi ; et, soit comme honneur, soit comme exemple, on ne peut vous compter de celui-là que votre obéissance. Oui, une cité qui a vu des consuls cinq ou six fois réélus (et je ne parle pas de ceux que faisaient la violence et le tumulte dans les derniers temps de la liberté expirante ; je parle de ces illustres laboureurs auxquels on allait porter les consulats au fond de leurs campagnes), cette même cité a vu le prince du genre humain refuser, comme trop ambitieux, un troisième consulat tant vous surpassez en modestie les Papyrius et les Quintius, vous Auguste, vous César, et Père de la patrie ! Mais ces vieux Romains, c’est la république qui les appelait : et vous n’est-ce donc pas aussi la république ? n’est-ce pas le sénat ? n’est-ce pas le consulat lui-même, qui, porté par vos nobles épaules, croit en quelque sorte s’élever et grandir ?

LVIII- Je ne vous mettrai pas en parallèle avec celui qui, par une suite non interrompue de consulats, avait fait de tant d’années comme une seule et longue année. Je vous compare à ceux dont on peut dire qu’ils ne se sont jamais donné les consulats qu’ils ont eus. Le sénat voyait un de ses membres consul pour la troisième fois, quand vous refusiez un troisième consulat. Nos suffrages imposaient donc à votre délicatesse un bien pénible sacrifice, en voulant que, prince, vous fussiez autant de fois consul que l’un de vos sénateurs ! Homme privé, c’eût été déjà trop de modestie que de vous en défendre. Pour le fils d’un consulaire, d’un triomphateur, est-ce s’élever que de devenir une troisième fois consul ? cet honneur ne lui est-il pas dû ? n’est-il pas mérité par le seul éclat de sa naissance ? De simples citoyens ont donc eu le privilège d’inaugurer l’année et d’ouvrir les fastes ! et ce fut un nouveau signe du retour de la liberté, que Rome eût pour consul un autre que César. Ainsi à l’expulsion des rois commença une année libre ; ainsi la servitude bannie fit entrer dans les fastes des noms étrangers aux grandeurs. Que je plains l’ambition de ceux qui étaient toujours consuls, comme ils étaient toujours princes ! Peut-être, au reste, était-ce moins de l’ambition qu’une maligne et basse jalousie, d’envahir ainsi toutes les années, et de ne transmettre que flétri et privé de son premier lustre cet honneur suprême de la pourpre consulaire. Mais, en vous, que