Page:Pline le Jeune - Panégyrique de Trajan, trad. Burnouf, FR+LA, 1845.djvu/23

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autoriser ici ! Car ce n’est pas vous-même, César, qui vous déférez cet honneur : il vous est librement offert, vous cédez aux vœux de notre amour ; nous ne sommes pas forcés de publier vos bienfaits, c’est vous qui êtes forcé de les entendre. Souvent, pères conscrits, je me suis représenté en moi-même combien de grandes qualités sont nécessaires à celui dont la main souveraine doit régir les mers, les continents, les guerres et la paix ; et, tout en créant, au gré de mon imagination, le modèle d’un prince qui pût dignement soutenir une puissance comparable à celle des dieux, il ne m’est jamais arrivé d’en souhaiter, encore moins d’en concevoir un qui ressemblât au grand homme que nous voyons. Tel a brillé dans la guerre, qui s’est éclipsé dans la paix ; tel a porté avec honneur la toge, mais non les armes. L’un a pris la crainte pour le respect, l’autre a cherché l’amour par l’abaissement. Celui-ci a perdu en public une estime acquise dans sa maison ; cet autre a terni dans sa maison l’éclat d’une gloire publique. Enfin nul ne s’est rencontré jusqu’ici, dont les vertus ne touchassent à quelque vice et n’en fussent altérées. Mais, dans le prince qui nous gouverne, quelle heureuse alliance de toutes les belles qualités ! quel harmonieux accord de toutes les gloires ! comme, chez lui, l’enjouement n’ôte rien à la gravité, la simplicité à la noblesse, la bonté à la grandeur ! Et sa vigueur, sa taille, son port majestueux, la dignité de son visage, même cet âge mûr sans décadence, et ces marques d’une vieillesse prématurée, dont les dieux semblent avoir paré sa tête pour la rendre plus vénérable, tant de signes n’annoncent-ils pas à tous les regards que l’on voit un prince ?

V. Tel devait être celui que n’ont fait empereur ni les guerres civiles, ni la république opprimée par les armes ; mais la paix, l’adoption, et le ciel enfin réconcilié avec la terre. Eh ! se pouvait-il qu’il n’y eût aucune différence entre l’ouvrage des hommes et celui des dieux ? Leur faveur se déclara sur vous, César Auguste, à l’instant même de votre départ pour l’armée ; et leur volonté se manifesta dès lors par un signe extraordinaire. Le sang des victimes abondamment répandu, ou des oiseaux volant à gauche, ont présagé l’élévation des autres princes ; vous, César, vous montiez, selon l’usage, au Capitole, lorsque le cri des citoyens, interprètes, sans le savoir, des décrets du