Page:Pline le Jeune - Panégyrique de Trajan, trad. Burnouf, FR+LA, 1845.djvu/47

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était brûlé, dévoré, comme si quelque fléau eût passé sur le pays, ou que les barbares, devant qui fuyait ce lâche, s’en fussent rendus maîtres ! II fallait convaincre les provinces que ce n’était pas l’empereur, mais Domitien, qui voyageait de la sorte. Vous avez donc moins fait pour votre gloire que pour l’intérêt général, en déclarant par un édit ce qui avait été dépensé pour chacun de vous deux. Qu’ainsi l’empereur s’accoutume à calculer avec l’empire ; qu’il parte, qu’il revienne, comme devant un jour rendre compte ; qu’il publie ses dépenses, c’est le moyen de n’en pas faire qu’il rougisse de publier. Il importe d’ailleurs que les princes à venir sachent, bon gré mal gré, combien coûtent leurs voyages ; et qu’ayant sous les yeux deux exemples contraires, ils se souviennent que l’opinion qu’on aura de leurs mœurs dépend du choix qu’ils auront fait ou de l’un ou de l’autre.

XXI- Des mérites si éclatants ne vous donnaient-ils pas des droits à quelques honneurs, à quelques titres nouveaux ? Et cependant vous refusiez jusqu’au nom de Père de la Patrie. Quel long combat il nous a fallu livrer à votre modestie ! combien tardive a été notre victoire ! Ce nom, que d’autres ont reçu le jour même de leur avénement avec ceux d’Empereur et de César, vous l’avez remis pour le temps où votre voix, toujours prête à diminuer le prix des biens dont vous êtes l’auteur, avouerait enfin que vous le méritez. C’est ainsi que, seul de tous les hommes, il vous fut donné d’être le père de la patrie avant de le devenir. Vous l’étiez dans nos cœurs, dans notre estime ; et peu importait à la piété publique comment vous seriez appelé, s’il n’y eût eu de l’ingratitude à vous traiter simplement d’Empereur et de César, quand c’était un père qu’elle trouvait en vous. Et par quelle bonté, par quelle douceur vous justifiez ce nom ! oui, vous vivez avec vos concitoyens comme un père avec sa famille. Revenu empereur après être parti homme privé, comme vous aimez à nous reconnaître, à vous voir reconnu de nous ! Nous sommes les mêmes à vos yeux ; et vous aussi vous croyez être le même : vous vous faites l’égal de tous, plus grand uniquement parce que vous êtes meilleur.

XXII- Quel jour que celui où vous entrâtes, longtemps attendu et vivement désiré, dans la capitale de votre empire ! et la simplicité même de cette entrée, quels sujets elle offrit d’admiration et de joie ! Les autres princes s’avançaient, je ne