Page:Pline le Jeune Lettres I Panckoucke 1826.djvu/125

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nait qu’un avocat à chaque client, il plaida seul pour Cluentius, et pendant quatre audiences pour Cornelius. Par là, il fait assez comprendre que ce qu’il avait été obligé d’étendre bien davantage dans sa plaidoirie de plusieurs jours, il avait su depuis, à force de retranchemens et de corrections, le réduire sur le papier à un discours, discours fort long, il est vrai, mais enfin à un seul discours. Me dira-t-on qu’il y a une grande différence entre un bon plaidoyer et un bon discours écrit ? C’est l’opinion de bien des gens, je le sais. La mienne (peut-être me trompé-je), c’est qu’il peut bien se faire qu’un bon plaidoyer ne soit pas un bon discours, mais qu’il est impossible qu’un bon discours ne soit pas un bon plaidoyer. Car enfin, le discours écrit est le type et le modèle du discours qui doit être prononcé. De là vient que dans les meilleurs, et dans ceux mêmes que nous savons n’avoir jamais été prononcés, nous trouvons de ces figures de style, qu’on est censé ne pas préparer d’avance. Ainsi, dans une des harangues contre Verrès, nous lisons :

Un ouvrier 'comment s’appelait-il ? Vous m’aidez fort à propos ; c’est Polyclète.

Il faut donc en conclure que la meilleure plaidoirie est celle qui se rapproche le plus du discours écrit, et qu’elle ne doit pas être resserrée dans un espace de temps trop court. Que si on l’y renferme, ce n’est plus la faute de l’avocat, c’est celle du juge. Les lois s’expliquent en ma faveur : elles ne sont point avares du temps pour l’orateur. Ce n’est point la brièveté, c’est l’attention à ne rien omettre, qu’elles lui recommandent : et comment s’acquitter de ce devoir, si l’on se pique d’être court ? C’est tout ce qu’on pourrait faire dans les causes d’une très-faible importance.

J’ajoute ce que je tiens d’un long usage, le plus sûr de