Page:Pline le Jeune Lettres I Panckoucke 1826.djvu/215

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tel que lui, et d’un oncle tel que vous ? Quand vous ne m’auriez pas confié ce soin, je l’aurais réclamé pour moi. Je sais que la préférence donnée à un maître, va me brouiller avec tous les autres ; mais, pour l’intérêt de vos neveux, il n’est point d’inimitiés si fâcheuses que je ne doive affronter, avec autant de courage qu’un père le ferait pour ses propres enfans. Adieu.

XIX. - Pline à Cerealis.

Vous me pressez de lire mon plaidoyer, dans une assemblée d’amis : je le ferai, puisque vous le désirez ; mais je ne m’y décide pas sans peine. Je sais qu’à la lecture les harangues perdent leur chaleur et leur force : elles ne méritent presque plus le nom de harangues. Rien ne leur donne ordinairement tant de valeur et d’intérêt, que la présence des juges, le concours des avocats, l’attente du succès, souvent la réputation du demandeur[1], enfin l’inclination secrète qui divise les auditeurs et les attache à différens partis. Ajoutez ; encore le geste de l’orateur, sa démarche, ses mouvemens rapides, et la vivacité de tout son corps, conforme aux sentimens animés qu’il exprime. De là vient que ceux qui déclament assis, bien qu’ils conservent d’ailleurs une partie des avantages qu’ils pourraient avoir debout, perdent toujours beaucoup en chaleur et en énergie. Ceux qui lisent ont encore bien plus à perdre : comme ils ne peuvent presque se servir ni de l’œil, ni de la main, auxiliaires si puissans de la déclamation, il ne faut pas s’étonner que

  1. La réputation du demandeur. De Sacy a traduit : La réputation des acteurs. Le nom d ’actor était donné à celui qui appelait en jugement.