Page:Pline le Jeune Lettres I Panckoucke 1826.djvu/295

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pereur ses propres vertus, par les charmes d’une louange naïve. J’ai voulu en même temps tracer à ses successeurs, par son exemple mieux que par aucun précepte, la route qu’ils devaient suivre pour arriver à la même gloire. Car, s’il y a de l’honneur à donner aux princes des leçons de vertu, il n’y a pas moins de danger et peut-être de présomption : mais laisser à la postérité l’éloge d’un prince accompli, montrer, comme d’un phare, aux empereurs qui viendront après lui une lumière qui les guide, c’est être aussi utile et plus modeste.

Voici, au reste, une circonstance qui m’a été fort agréable. Voulant lire cet ouvrage à mes amis, je ne les invitai point par les billets d’usage : je leur fis seulement dire de venir, si cela ne les gênait en rien, s’ils avaient quelque loisir, et vous savez qu’à Rome on n’a jamais, ou presque jamais, le loisir ou la fantaisie d’assister à une lecture ; cependant, ils sont venus deux jours de suite, et par le temps le plus affreux : et quand, par discrétion, je voulais borner là ma lecture, ils exigèrent de moi que je leur donnasse une troisième séance. Est-ce à moi, est-ce aux lettres qu’ils ont rendu ces honneurs ? j’aime mieux croire que c’est aux lettres, dont l’amour presque éteint se rallume aujourd’hui[1].

Mais songez, je vous prie, quel est le sujet pour lequel ils ont montré tant d’empressement. Comment se fait-il que ce qui nous ennuyait sous d’autres empereurs, même dans le sénat, où il fallait bien le souffrir, et quoiqu’on ne nous demandât qu’un moment d’attention, on se plaise aujourd’hui à le lire et à l’écouter pendant trois jours ? Ce n’est point que l’orateur soit plus éloquent ; mais son discours a été écrit avec plus de liberté, et par conséquent avec plus de plaisir. Le règne de notre prince

  1. J’aime mieux, etc. Que veut dire, dans l’édition de M. Lemaire, Quo prope exstincta refoventur ? tous mes textes portent quœ prope exstincta refoventur.