Page:Pline le Jeune Lettres I Panckoucke 1826.djvu/393

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autre objet, à sec, sur le bord : l’eau le mouille peu-à-peu, et enfin le couvre tout-à-fait. Bientôt, il reparaît, et l’eau l’abandonne insensiblement. Regardez assez longtemps, et vous verrez, dans le jour, la même chose se répéter jusqu’à deux et trois fois. Quelque vent souterrain ouvrirait-il ou fermerait-il quelquefois la source de cette fontaine, selon qu’il entre, ou se retire avec force ? C’est ce qui arrive dans une bouteille, dont l’ouverture est un peu étroite : l’eau n’en sort pas tout à coup, et retenue, dans la bouteille renversée, par l’effort de l’air qui veut pénétrer, elle ne s’échappe que par élans. Cette fontaine obéit-elle aux mêmes influences que l’Océan ? la même cause qui étend ou resserre les flots de la mer, fait-elle aussi croître ou décroître ce mince filet d’eau[1] ? Ou bien, comme les fleuves, qui portent leurs eaux à la mer, sont refoulés par les vents contraires ou par le reflux, y aurait-il de même quelque obstacle interne qui repousse les eaux de cette fontaine[2] ? Peut-être encore, les veines qui l’alimentent ont-elles une capacité déterminée : tandis qu’elles rassemblent de nouveau la quantité d’eau qu’elles viennent d’épancher, le ruisseau s’abaisse et coule plus lentement ; au lieu qu’il s’enfle et se précipite, lorsque ces veines sont remplies. Enfin, existerait-il quelque balancement secret dans le bassin qui renferme ces eaux, de telle sorte que l’épanchement fût plus libre, lorsque les eaux sont moins abondantes ; et qu’au contraire, lorsqu’elles affluent, l’épanchement arrêté ne se fît que par bouillons[3] ?

  1. Fait-elle aussi croître, etc. J’ai lu egeritur au lieu d’erigitur. Il me semble que notre leçon, justifiée d’ailleurs par plusieurs manuscrits, marque mieux l’opposition des deux mots : egeritur contraste avec supprimitur. L’édition romaine d’Heusinger porte supprimitur erigiturque et egeritur.
  2. Qui repousse les eaux, etc. J’ai rétabli dans le texte devant repercutiat les deux mots per momenta, supprimés dans plusieurs éditions. Ils se trouvent dans d’excellens textes, et s’ils n’étaient pas de Pline, je ne vois pas comment ils auraient pu s’y introduire : il est plus facile et plus raisonnable d’imaginer qu’ils ont été oubliés par quelque copiste négligent.
  3. Lorsqu’elles affluent, etc. Au lieu de repletur, j’ai admis