Page:Pline le Jeune Lettres I Panckoucke 1826.djvu/417

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la fendre sans qu’elle se charge de glèbes énormes, et, pour les briser, il faut repasser le soc jusqu’à neuf fois.

Les prés, émaillés de fleurs, y fournissent du trèfle et d’autres sortes d’herbes, toujours aussi tendres et aussi pleines de suc que si elles venaient de naître. Ils tirent cette fertilité des ruisseaux qui les arrosent, et qui ne tarissent jamais. Cependant, en des lieux où l’on trouve tant d’eaux, l’on ne voit point de marécages, parce que la terre, disposée en pente, laisse couler dans le Tibre le reste de celles dont elle ne s’est point abreuvée. Ce fleuve, qui passe au milieu des champs, est navigable, et sert dans l’hiver et au printemps à transporter toutes les provisions à Rome. En été, il baisse si fort, que son lit est presque à sec : il faut attendre l’automne pour qu’il reprenne son nom de grand fleuve. Il y a un plaisir extrême à contempler le pays du haut d’une montagne. L’on croit voir, non une campagne ordinaire, mais un paysage dessiné d’après un modèle idéal ; tant les yeux, de quelque côté qu’ils se tournent, sont charmés par l’arrangement et par la variété des objets !

La maison, quoique située au bas de la colline, a la même vue que si elle était placée au sommet. Cette colline s’élève par une pente si douce, que l’on s’aperçoit que l’on est monté, sans avoir senti que l’on montait. Derrière la maison, mais assez loin d’elle, est l’Apennin. Dans les jours même les plus calmes et les plus sereins, elle en reçoit de fraîches haleines, qui n’ont plus rien de violent et d’impétueux : leur force s’est brisée en chemin. Son exposition est presque entièrement au midi, et semble inviter le soleil, en été vers le milieu du jour en hiver un peu plus tôt, à venir dans une galerie fort large, et longue à proportion[1].

  1. Longue à proportion. L’ancien éditeur de la traduction de De Sacy avait à tort admis dans le texte et prominulam. De Sacy