Page:Pline le Jeune Lettres I Panckoucke 1826.djvu/433

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le legs est valable : et la volonté du testateur (je ne sais comment les jurisconsultes prendront ceci) est pour moi plus sacrée que la loi, surtout lorsqu’il s’agit de conserver à notre patrie le bien qu’on lui a fait. Quelle apparence qu’après lui avoir donné onze cent mille sesterces de mon propre bien, je voulusse lui disputer un legs étranger, qui n’est guère plus du tiers de cette somme ? Je ne doute pas que vous n’approuviez ma décision, vous qui aimez notre patrie en bon citoyen. Je vous supplie donc de vouloir bien, à la première assemblée des décurions, expliquer la disposition du droit, mais en peu de mots et avec simplicité : vous ajouterez ensuite, que je suis prêt à payer les quatre cent mille sesterces que Saturninus a légués. Rendons à sa libéralité tout l’honneur qui lui est dû : ne nous réservons que le mérite de l’obéissance.

Je n’ai pas voulu en écrire directement à l’assemblée. Ma confiance en votre amitié et en vos talens m’a fait penser que vous deviez et que vous pouviez, en cette occasion, parler pour moi comme pour vous-même. J’ai même appréhendé que ma lettre ne parût s’écarter de cette sage mesure qu’il vous sera aisé de garder dans le discours. L’air de la personne, le geste, le ton, fixent et déterminent le sens de ce qu’elle dit ; mais la lettre, privée de tous ces secours, n’a rien qui la défende contre les malignes interprétations. Adieu.