Page:Pline le Jeune Lettres I Panckoucke 1826.djvu/449

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

XIV. - Pline à Valerianus.

Vous me priez (et je me suis engagé à me rendre là-dessus à vos prières) de vous mander quel succès avait eu l’accusation intentée par Nepos contre Tuscilius Nominatus.

On fit entrer Nominatus : il plaida lui-même sa cause, et personne ne parla contre lui ; car les députés des Vicentins non-seulement ne le chargèrent point, mais l’aidèrent même à sortir d’embarras. Le précis de sa défense fut, qu’il avait manqué de courage plutôt que de fidélité : qu’il était sorti de chez lui, résolu de plaider : qu’il avait même paru a l’audience ; mais qu’il s’était retiré, effrayé par les discours de ses amis ; qu’on lui avait conseillé de ne pas s’opposer au dessein d’un sénateur, qui ne voyait plus dans l’affaire un simple établissement de marchés, mais une question qui touchait son crédit, son honneur et sa dignité : que s’il négligeait cet avis, il devait s’attendre a un ressentiment implacable. En effet, lorsqu’il s’était retiré, quelques personnes, mais en très-petit nombre, avaient hautement applaudi à sa détermination[1]. Il termina sa défense[2] par des excuses et des supplications, qu’il accompagna de beaucoup de larmes ; et même, avec son habileté ordinaire[3], il avait tourné tout son discours de manière à paraître plutôt demander grâce que justice : c’était en effet le parti le plus adroit et le plus sûr.

Afranius Dexter, consul, fut d’avis de l’absoudre. Il avoua que Nominatus eût mieux fait de soutenir la

  1. Quelques personnes, mais en très-petit nombre, avaient hautement applaudi, etc. Si j’ai bien saisi le sens de la phrase, De Sacy s’est entièrement trompé : il traduit : quoiqu’il dit vrai, cela ne fut écouté et reçu favorablement que de fort peu de personnes. Le traducteur suivait-il un texte différent ? je l’ignore ; mais dans aucune leçon des commentateurs, je ne puis trouver trace du sens qu’il a adopté. Je crois que Pline veut appuyer, par cette réflexion, ce que Nominatus venait d’alléguer pour sa défense, savoir : Qu’il avait été effrayé par les discours de ses amis, qu’on lui avait conseillé de ne pas s’opposer au dessein de Solers.
  2. Il termina sa défense. J’ai ajouté inde à la phrase subjunxit preces, etc. : c’est la leçon des dernières éditions.
  3. Avec son habileté ordinaire. D’après la même autorité, j’ai lu in dicendo au lieu de dicendo.