L’âme s’avance ainsi dans son ascension vers Dieu jusqu’à ce que, s’étant élevée au-dessus de tout ce qui lui est étranger, elle voie seule à seul, dans toute sa simplicité, dans toute sa pureté, Celui dont tout dépend, auquel tout aspire, duquel tout tient l’existence, la vie, la pensée : car il est le principe de l’existence, de la vie, de la pensée. Quels transports d’amour ne doit pas ressentir celui qui le voit[1], avec quelle ardeur ne doit-il pas souhaiter s’unir à lui, de quel ravissement ne doit-il pas être transporté ! Celui qui ne l’a pas encore vu le désire comme le Bien ; celui qui l’a vu l’admire comme la souveraine Beauté, est frappé à la fois de stupeur et de plaisir, ressent un saisissement qui n’a rien de douloureux, aime d’un véritable amour, d’une ardeur sans égale[2], se rit des autres amours, et dédaigne les choses qu’il appelait auparavant du nom de beautés. C’est ce qui arrive à ceux auxquels sont apparues les formes des dieux et des démons : ils ne regardent plus la beauté des autres corps. Que pensons-nous donc que doive éprouver celui qui voit le Beau même[3], le Beau pur, qui, en vertu de sa pureté même, est sans chair et sans corps, en dehors de la terre et du ciel ! Toutes ces choses en effet sont contingentes et composées ; elles ne sont pas des principes ; elles dérivent de Lui. Si l’on peut arriver à voir Celui qui donne à tous les êtres leur perfection tout en demeurant immobile en lui-même, sans rien recevoir, si l’on se repose dans sa contemplation et qu’on en jouisse, en lui devenant semblable, quelle beauté souhaitera-t-on voir encore ? Étant la Beauté suprême, la Beauté première, Il rend beaux ceux qui l’aiment et par là ils deviennent eux-mêmes dignes d’amour. Voilà le grand but, le but suprême des âmes ; voilà le but qui appelle tous leurs efforts si elles ne veulent pas être déshéritées de cette
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LIVRE SIXIÈME.