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DEUXIÈME ENNÉADE.

entre les corps, puisqu’ils ont chacun la même influence (ἀποῤῥοή), et que, sur la terre, leurs diverses actions se confondent en une seule, qui ne varie que par la diversité des lieux, par la proximité et par l’éloignement des objets. Nous raisonnerons de même dans l’hypothèse où l’on admettrait que les astres répandent du froid. Mais je ne saurais comprendre comment ils pourraient rendre les uns savants, les autres ignorants, ceux-ci grammairiens, ceux-là orateurs, d’autres musiciens ou habiles dans divers arts ; comment ils exerceraient une action qui n’aurait nul rapport avec la constitution des corps, comme de nous donner un père, un frère, un fils, une femme de tel ou tel caractère, de nous faire réussir, devenir généraux ou rois[1].

Supposons au contraire que les astres soient animés et qu’ils agissent avec réflexion. Que leur avons-nous fait pour qu’ils veuillent nous nuire ? Ne sont-ils pas placés dans une région divine ? Ne sont-ils pas divins eux-mêmes ? Ils ne se trouvent pas soumis aux influences qui rendent les hommes bons ou mauvais. Enfin ils ne sauraient éprouver ni bien ni mal par l’effet de notre prospérité et de nos revers.

III. Mais ce n’est pas volontairement, dira-t-on peut-être, que les astres nous nuisent : ils y sont contraints par les lieux et par les aspects[2]. S’il en est ainsi, ils devraient tous produire les mêmes effets quand ils se trouvent dans les mêmes lieux et les mêmes aspects. Qu’éprouve de différent une planète selon qu’elle est dans telle ou telle partie du zodiaque ? Qu’éprouve le zodiaque lui-même ? En effet, les planètes ne se trouvent pas dans le zodiaque même, elles sont au-dessous et très-loin de lui, et d’ailleurs, quelque lieu qu’elles parcourent, elles sont également dans le ciel. Il serait ridicule de prétendre qu’elles changent de nature

  1. Voy. Enn. IV, liv. iv, § 31.
  2. Plotin discute la question de l’influence des aspects dans le § 4.