XVII. Examinons si les raisons contenues dans l’Âme sont des pensées (νοήματα). Comment l’Âme pourrait-elle produire par des pensées ? C’est la Raison qui produit dans la matière (ὁ λόγος έν ὕλῃ ποιεῖ) ; or le Principe qui produit naturellement (τὸ ποιοῦν φυσιϰῶς) n’est pas une pensée (νόησις) ni une intuition (ὅρασις), mais une Puissance qui façonne la matière aveuglément (δύναμις τρεπτιϰὴ τῆς ὕλης, οὐϰ εἰδυῖα), comme un cercle donne à l’eau une figure et une empreinte circulaire. En effet, la Puissance naturelle et génératrice (ὴ φυσιϰὴ δύναμις ϰαὶ γεννητιϰὴ) a pour fonction de produire ; mais il lui faut le concours de la Puissance principale de l’Âme (τὸ ἡγούμενον τῆς ψύχὴς) qui forme et qui fait agir l’Âme génératrice engagée dans la matière (ἡ ἔνυλος ϰαὶ γεννητιϰὴ ψυχή). Est-ce par le raisonnement que la Puissance principale de l’Âme forme l’Âme génératrice ? Si c’est par le raisonnement, elle doit considérer soit un autre objet, soit ce qu’elle possède en elle-même. Si elle considère ce qu’elle possède en elle-même, elle n’a pas besoin de raisonner[1] : car ce n’est pas par le raisonnement que l’Âme façonne la matière, c’est par la Puissance qui contient les raisons. Puissance qui seule est efficace et capable de produire. L’Âme produit donc par les formes (ϰατ’ εἴδη ποιεῖ). Elle reçoit de l’Intelligence les formes qu’elle transmet. L’Intelligence donne les formes à l’Âme universelle qui est placée immédiatement au-dessous d’elle, et l’Âme universelle les transmet à l’Âme inférieure [la Puissance naturelle et génératrice] en la façonnant et l’illuminant[2]. L’Âme inférieure produit, tantôt sans rencontrer d’obstacles, tantôt
- ↑ Voy. Enn. IV, liv. iv, § 9-13. Quant au sens des mots λογίσζεσθαι, λογισμὸς, que nous traduisons par raisonner, raisonnement, Voy. la note 5 de la page 36.
- ↑ Il faut lire ici τύπουσα au lieu de τόπουσα, et ὥσπερ ἐπιτεχθεῖσα au lieu de ὡς περιέπει ταχθεῖσα.
point de sens satisfaisant, il faut lire comme Ficin semble l’avoir fait : ἄλλως ἐϰ τῆς ὕλς γιγνομένων.