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LIVRE TROISIÈME.

ligence n’est pas un être particulier ; elle est tous les êtres intelligibles][1], et tous les êtres forment une pluralité ; or, s’il y a pluralité d’êtres, il doit se trouver des différences entre eux, il doit y avoir des êtres qui occupent le premier, le deuxième ou le troisième rang. Il en résulte que les âmes des animaux qui sont engendrés, au lieu de posséder la plénitude de leur essence, sont imparfaites et semblent s’être affaiblies par leur procession. En, effet, la raison [génératrice] de l’animal, quoiqu’elle soit animée, est une autre âme que celle dont procède la Raison universelle. Cette Raison elle-même perd de son excellence en descendant dans la matière, et ce qu’elle produit est moins parfait. Considère combien la créature est éloignée du Créateur, et combien cependant elle est encore une œuvre admirable. Mais il ne faut pas attribuer au Créateur les caractères de la créature : car le principe est supérieur à ce qu’il produit, il est parfait ; et au lieu de nous plaindre] il faut bien plutôt admirer qu’il ait communiqué quelques traces de sa puissance aux êtres qui dépendent de lui. S’il leur a donné plus qu’ils ne sauraient garder, nous n’en avons que plus de motifs d’être satisfaits ; évidemment nous ne pouvons accuser que les créatures [de leur imperfection], et les dons de la Providence sont surabondants.

IV. Si l’homme était simple (c’est-à-dire, s’il était ce qu’il a été fait et si toutes ses actions ainsi que ses passions dérivaient du même principe[2]), nous n’aurions certainement aucun motif d’élever des plaintes à son sujet pas plus qu’au sujet des autres animaux. Maintenant, si nous reprenons quelque chose dans l’homme, c’est seulement dans l’homme perverti, et nous avons raison : car l’homme n’est pas seulement ce qu’il a été fait ; il a en outre un autre principe qui est libre [l’intelligence avec la raison[3]]. Ce principe

  1. Voy. t. I, p. 118.
  2. Nous lisons ταύτα avec M. Kirchhoff au lieu de ταῦτα.
  3. « Duo sunt in anima nostra actionum principia