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LIVRE QUATRIÈME.


-ils pas aux fleuves comme les bons ? Dans ce cas, celui qui accorde ne sait pas qu’il accorde ; il accorde simplement, et ce qu’il accorde est conforme à l’ordre de l’univers. Il s’ensuit que, si un individu pervers demande et obtient ce qui est à la portée de tous, il n’est pas nécessaire qu’il en soit puni.

Il ne faut donc pas admettre que l’univers soit sujet à éprouver des passions : d’abord, l’Âme qui le gouverne est tout à fait impassible ; ensuite, s’il y a en lui des passions, elles ne sont éprouvées que par ses parties ; quant à lui, ne pouvant éprouver rien de contraire à sa nature, il reste impassible en lui-même. — Éprouver des passions semble convenir aux astres considérés comme parties de l’univers ; mais, considérés en eux-mêmes, ils sont impassibles, parce que leurs volontés sont impassibles et que leurs corps demeurent inaltérables comme leur nature, parce qu’enfin si, par leur âme, ils communiquent quelque chose d’eux-mêmes aux êtres inférieurs, leur âme ne perd rien et leurs corps restent les mêmes. Si quelque chose découle d’eux, ils ne s’en aperçoivent pas ; si quelque chose leur arrive, ils y restent également insensibles ;

XLIII. Comment le sage pourra-t-il échapper à l’action des enchantements et des philtres employés par la magie ! — Son âme y échappe complètement : sa raison est impassible et ne peut être amenée à changer d’opinion. Le sage ne peut donc pâtir que par la partie irraisonnable qu’il reçoit de l’univers ; c’est cette partie seule qui pâtit. Mais il ne subira pas les amours inspirés par les philtres, parce que l’amour suppose le penchant d’une âme à éprouver ce qu’éprouve une autre âme. Comme les enchantements agissent sur la partie irraisonnable de l’âme, on détruira leur puissance en les combattant et en leur résistant par d’autres enchantements. On peut donc, par suite d’enchantements, éprouver des maladies, la mort même, et en général toutes les affections relatives au corps. Toute partie de l’univers est sujette à éprouver une affection causée en elle par une autre partie