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QUATRIÈME ENNÉADE.


ces choses d’une certaine manière ; elle les connaît, non parce qu’elle les place en elle-même, mais parce qu’elle les possède en quelque sorte, qu’elle en a l’intuition ; parce que, étant ces choses d’une manière obscure, elle se réveille, passe de l’obscurité à la clarté, de la puissance à l’acte. Elle se comporte de la même façon pour les choses sensibles : en les rapprochant de ce qu’elle a en elle-même, elle les rend lumineuses, elle en a l’intuition[1], parce qu’elle possède une puissance prête [à les percevoir et] à les enfanter pour ainsi dire[2]. Quand l’âme a appliqué toute la force de son attention à un des objets qui s’offrent à elle, elle en reste longtemps affectée comme si cet objet était présent, et

    intelligibilis veritatis portionem percipere. Nihil accomodatius dici poterat ad reminiscentiam refellendam, et tamen vel hic Plotinus eamdem putide ingerit. » (Dogmata theologica, t. I, p. 146.) Ici le P. Thomassin, reproche avec raison à Plotin de conserver, sans doute par complaisance pour Platon, la doctrine de la réminiscence, qui est complètement inutile dans son propre système. Ce reproche, qu’il lui adresse encore ailleurs (Voy. ci-dessus p. 289, note 2), est d’autant plus fondé que Plotin lui-même a démontré ci-dessus (p. 337) que la mémoire ne s’applique qu’aux choses qui passent, et qu’il suffit à l’âme de réfléchir aux intelligibles pour les concevoir.

  1. Voy. ci-dessus, p. 234, note 3. On trouve aussi dans saint Augustin cette distinction de l’intuition sensible et de l’intuition intellectuelle : « Visiones enim duæ sunt, una sentientis, altera cogitantis… Potius credendum est mentis intellectualis ita conditam esse naturam, ut rebus intelligibilibus, disponente Conditore, subjuncta sic ista videat in quadam luce incorporea, quemadmodum oculus carnis videt quæ in hac corporea luce circumadjacent, cujus lucis capax eique congruens est creatus. » (De Trinitate, XI, 9 ; XII, 15.)
  2. Le P. Thomassin cite ce passage et le commente en ces termes : « Ita Plotinus sine ulla novi accidentis accessione vel discessione, atque adeo sine ulla mutatione, rerum omuium cogitationem fieri in anima explanat : ex eo uno quod anima omnia quodammodo sit, superiora obscurius, inferiora lucidius ; ideoque cognoscat omnia per sui ipsius vel quasi seminum in se latentium excitationem. » (Dogmata theologica, t. I, p, 271. Voy. encore ibid., p. 322.)