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QUATRIÈME ENNÉADE, LIVRES III, IV, V.


nous sommes condamnés par la justice divine à passer dans un nouveau corps (t. I, p. 48). La nature de ce corps est toujours en harmonie avec la disposition que nous avons contractée dans l’existence antérieure, et la métempsycose (que notre auteur nomme toujours la métensomatose) est ainsi notre naturelle et nécessaire punition, jusqu’au terme de chacune des périodes de la vie du monde, où, affranchies de leurs corps, toutes les âmes reviennent, sans perdre leur nature propre et leur indépendance, habiter le monde intelligible avec l’Âme universelle (t. II, p. 290-291).

7. L’âme après la vie terrestre. Retour de l’âme et Dieu.

Tandis que les âmes qui ont commis d’injustes actions passent dans de nouveaux corps pour y subir la punition qu’elles méritent, les âmes qui se sont purifiées[1], c’est-à-dire qui, au sortir de la vie terrestre, n’entraînent avec elles rien de corporel, jouissent du privilège de n’être dans rien de corporel. Puisqu’elles n’ont pas de corps, elles vont nécessairement habiter là où résident les essences intelligibles, c’est-à-dire en Dieu (t. II, p. 312)[2].

Quel est l’état de l’âme qui est ainsi réunie à Dieu ?

En se séparant du corps, l’âme cesse d’exercer les facultés qui se rapportent à la vie végétative et à la vie sensitive.

Les facultés de la vie végétative ont pour fonction de donner au corps sa forme, de le nourrir et de satisfaire ses besoins. Elles ne sauraient donc survivre à la destruction du composé. D’ailleurs, elles ne périssent pas à proprement parler : elles cessent seulement d’être présentes au corps ; elles remontent au principe duquel elles procèdent[3] et elles continuent d’y subsister, mais seulement en puissance (t. II, p. 379, 423).

  1. Voy. le passage de Porphyre cité dans le tome I, p. LVII, note 4 : « Il faut se purifier au moment de la mort, comme lorsqu’on est initié aux mystères, affranchir son âme de toute mauvaise passion, en calmer les emportemens, en bannir l’envie, la haine et la colère, afin de posséder la sagesse quand on sort du corps, etc.
  2. « Élève ce qu’il y a de divin en toi vers ce qui est divin au premier degré (εἰς τὸ πρωτόγονον θεῖον). Il est beau que dans toutes mes lettres je le rappelle, conformément aux bonnes dispositions de ton âme, ce que Plotin dit à ceux qui l’entouraient, au moment où il séparait son âme de son corps. » (Synesius, Lettre 138 ; p. 276, éd. Petau.) Voy. Vie de Plotin, § 2, Enn. I, p. 3 ; et Enn. VI, liv. V, § I.
  3. Les âmes qui sont dans le monde intelligible y ramènent avec elles-mêmes cette partie de leur essence qui est désireuse d’engendrer [c’est-à-dire la puissance végétative et générative] et qu’on peut avec raison regarder comme l’essence qui est divisible dans les corps. » (Enn. III, liv. IV, § 6 ; t. II, p. 100.)