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CINQUIÈME ENNÉADE.


ôte tout attribut, qu’on n’affirme rien de lui, qu’on ne commet pas l’erreur de supposer qu’il y ait quelque chose en lui, on le laisse être simplement, sans lui rien prêter des choses qu’il n’a pas. N’imitons pas ces panégyristes ignorants qui rabaissent la gloire de ceux qu’ils louent en leur attribuant des qualités inférieures à leur dignité, parce qu’ils ne savent pas parler convenablement des personnes dont ils font l’éloge. De même, n’attribuons à Dieu aucune des choses qui sont au-dessous de lui et après lui ; reconnaissons qu’il en est la cause éminente sans être aucune d’elles. La nature du Bien ne consiste point à être toutes choses en général, ni l’une d’elles en particulier. En effet, dans ce cas, le Bien ne ferait qu’un avec tous les êtres ; par conséquent, il n’en différerait que par son caractère propre, c’est-à-dire par une différence et par l’addition de quelque qualité. Au lieu d’être un, il serait deux choses, dont l’une, savoir, ce qu’il aurait de commun avec les autres êtres, ne serait pas le bien, tandis que l’autre serait le bien. Dans cette hypothèse, il serait mélangé de bien et de non-bien : il ne serait plus le Bien pur et premier. Le Bien premier serait ce dont l’autre chose participerait particulièrement, participation en vertu de laquelle elle deviendrait le bien. Cette chose ne serait ainsi le bien que par participation, tandis que celle dont elle participerait ne serait rien en particulier ; ce qui montre que le Bien n’est rien de particulier. Mais si, dans le Principe que nous examinons, le Bien est tel (c’est-à-dire s’il est une différence dont la pré-

    et à plus forte raison encore ne peut-il avoir d’accidents qui puissent être indiqués par l’attribut. Il n’y a donc pour Dieu, d’aucune manière, un attribut affirmatif. Les attributs négatifs sont ceux dont il faut se servir pour guider l’esprit sur ce qu’on doit croire à l’égard de Dieu : car il ne résulte de leur part aucune multiplicité, et ils amènent l’esprit au terme de ce qu’il est possible à l’homme de saisir de Dieu, etc. » (Guide des égarés, trad. de M. S. Munk, t. I, p. 241.)