Page:Plotin - Ennéades, t. III.djvu/33

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
xxiv
SOMMAIRES.


(II) La diversité que présentent les individus ne saurait s’expliquer par la manière dont le mâle et la femelle s’unissent dans l’acte de la génération. Elle a pour cause la différence des raisons séminales.

(III) On ne peut rien conclure contre leur pluralité de la similitude qu’on remarque dans certains individus. Il n’y a point d’indiscernables dans les productions de la nature ni dans les œuvres de l’art : car à la forme spécifique s’unit toujours une différence qui est propre à l’individu.


LIVRE HUITIÈME.
DE LA BEAUTÉ INTELLIGIBLE.

(I) Dans les œuvres de l’art, la beauté provient de la forme que l’artiste donne à la matière pour y représenter l’idéal qu’il a conçu : car il ne se borne pas à imiter la nature ; il remonte aux idées mêmes desquelles dérive la nature des objets.

(II-III) Dans les œuvres de la nature, la beauté provient également de la forme qui passe du principe créateur dans la chose créée. Elle ne se trouve pas dans la masse corporelle, en tant que masse : car la forme seule pénètre l’œil. D’ailleurs la beauté que nous reconnaissons aux sciences, aux vertus et à l’âme elle-même est évidemment immatérielle. Il faut donc admettre que la beauté du corps a pour archétype la beauté qui réside dans la nature et dont elle provient. Celle-ci à son tour a pour archétype la beauté qui réside dans l’âme et dont elle procède. Enfin la beauté de l’âme a elle-même pour principe la perfection de l’Intelligence en qui réside la Beauté absolue.

(IV) Dans le monde intelligible, tous les êtres sont beaux parce qu’ils brillent d’une clarté infinie, que chacun d’eux se contemple lui-même et contemple tous les autres. La vie se passe là dans une contemplation perpétuelle et tranquille qui est la sagesse, et comme l’Intelligence est tous les êtres qu’elle pense, l’Essence, la Sagesse et l’Intelligence sont identiques dans le monde intelligible.

(V) Toutes les œuvres de l’art ou de la nature ont une certaine sagesse pour principe. La sagesse de l’artiste se ramène à celle de la nature qui lui sert de règle. Celle de la nature se ramène elle-même à celle de l’Intelligence, en qui la vraie sagesse et la vraie essence ne sont qu’une seule et même chose. Aussi possède-t-elle les idées, c’est-à-dire les formes substantielles ou essences, types vivants de tout ce qui existe dans le monde sensible.

(VI) Les sages de l’Égypte faisaient preuve d’une science consommée en employant des signes symboliques par lesquels ils désignaient les objets intuitivement en quelque sorte, sans avoir recours à la parole. En représentant les images des objets individuels, ils permettaient de saisir les choses dans leur totalité naturelle que la science doit reproduire. La science, en effet, n’est pas une pensée, un raisonnement ; elle est l’image complète des types individuels qu’elle contemple.