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SOMMAIRES.


méritent vraiment le nom de qualités sont celles qui qualifient les choses et qui sont des puissances et des formes soit de l’âme, soit du corps. Par cette définition on comprend comment les impuissances et les défauts constituent des qualités : c’est que ce sont des dispositions et des formes imparfaites. Par là, on voit également qu’il est inutile de distinguer, comme le fait Aristote, quatre espèces de qualités. Enfin, par là on sépare nettement les qualificatifs des relatifs. — Outre toutes ces critiques, il en est encore une que l’on est en droit d’adresser à la doctrine d’Aristote, et qui s’applique à toutes ses catégories : c’est qu’il ne distingue pas le sensible d’avec l’intelligible ; ici, par exemple, il réunit dans une même catégorie la qualité intelligible, qui est proprement l’essence, et la qualité sensible, qui seule doit porter le nom de qualité et qui consiste dans une disposition soit adventice, soit originelle.

(XIII-XIV) Les catégories désignées par les mots et Quand indiquent qu’un objet se trouve dans un temps ou un lieu déterminé. Il aurait donc mieux valu prendre ici pour catégories les pures notions de lieu et de temps.

(XV-XVIII) La catégorie d’Agir devrait être remplacée par celle du Mouvement, dont l’action et la passion ne sont que deux modes. Il vaudrait mieux faire une catégorie de l’acte (ἐνέργεια (energeia)) que de l’action (ποίησις (poiêsis)), parce que l’acte s’affirme de la substance ainsi que de la qualité. Ensuite, le mouvement doit plutôt que l’acte lui-même former une catégorie. En vain on prétend que le mouvement est un acte imparfait, qu’il implique l’idée de succession et de temps, tandis que l’acte est en dehors du temps ; cette assertion est fausse : la notion du temps n’est impliquée dans le mouvement que par accident. Ensuite, il est tout à fait arbitraire d’avancer que l’acte et le mouvement appartiennent au genre des relatifs ; une pareille théorie conduit à faire de toutes choses des relatifs. Enfin, la distinction que les Péripatéticiens établissent entre l’acte et le mouvement soulève une foule de difficultés, comme on le voit en examinant les diverses classes de verbes. Les uns, en effet, expriment une action parfaite ou un état, comme penser, et les autres une action successive, comme marcher. En outre, chacune de ces classes se subdivise en deux espèces : verbes exprimant une action absolue, par laquelle le sujet seul est modifié, comme marcher, penser ; verbes exprimant une action relative à un autre objet et servant seuls à former les verbes passifs, comme diviser.

(XIX-XXII) Puisqu’en toutes choses Pâtir ne fait qu’un seul genre avec Agir, qu’il vient après, sans en être le contraire, on a tort de faire de Pâtir une catégorie à part. L’action et la passion doivent être placées dans un seul et même genre, celui du mouvement, dont elles ne sont que des points de vue corrélatifs. En effet, quand on étudie leur nature, on voit que l’action est un mouvement spontané, et que la passion consiste à éprouver, sans y contribuer en rien, une modification qui ne concoure pas à l’essence. Il résulte de là que les actes ne sont pas tous des actions ; la pensée, par exemple, s’exerce sur elle-même.

(XXIII) La catégorie d’Avoir est fort vague et s’applique à tout. Si l’on essaie d’en limiter l’application, on tombe dans l’arbitraire.

(XXIV) On peut en dire autant de la catégorie de la Situation. Elle a en outre le défaut de rentrer dans les précédentes.