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Page:Plutarque - Œuvres complètes de Plutarque - Œuvres morales et œuvres diverses, tome 1, 1870.djvu/713

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au monarque : c’était que parmi tous ses enfants, et il en avait un grand nombre, un seul fût exempt de partir à l’armée et restât avec lui pour soigner sa vieillesse. Xerxès, irrité, fit égorger et couper en deux ce seul fils que demandait Pythès, et donna l’ordre à son armée de passer entre les lambeaux du cadavre ; après quoi il emmena les autres fils avec lui. Tous périrent dans diverses batailles. Désespéré d’une telle barbarie, Pythès éprouva ce qui arrive à beaucoup d’hommes dépourvus d’énergie et de sens. Il redoutait la mort et la vie lui était insupportable ; il ne voulait plus vivre, mais il n’avait pas assez de force pour se défaire de l’existence. Or il y avait dans la ville une vaste plate-forme au pied de laquelle coulait un fleuve nommé le Pythopolitès. Il s’y fit construire un monument funéraire ; et il détourna le courant des eaux, de manière à ce qu’en traversant la plate-forme elles vinssent baigner le sépulcre. Ce travail achevé, il descendit seul dans le monument après avoir remis à sa femme et le pouvoir et le gouvernement absolu de la ville. Mais il lui défendit d’approcher jamais de ce côté : elle devait seulement lui faire parvenir chaque jour son repas, déposé dans une petite nacelle, jusqu’au jour où l’esquif continuerait sa route, rapportant les vivres intacts : dès lors il y aurait lieu de cesser tout envoi parce que Pythès n’existerait plus. C’est ainsi qu’il passa le reste de sa vie. Pour sa femme, elle administra le pouvoir avec sagesse, et elle apporta un heureux changement aux maux que les citoyens avaient soufferts.


FIN DU PREMIER VOLUME