Page:Plutarque - Vies, traduction Ricard, 1829, tome 1.djvu/180

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convenables à la tragédie qu’à l’histoire. Mais peut-on se refuser à les croire, quand on considère les événements extraordinaires que produit la fortune, et surtout lorsqu’on pense à la grandeur de Rome, qui ne serait jamais parvenue à un si haut degré de puissance, si elle n’eût eu une origine divine, et marquée par les faits les plus merveilleux ?

X. La mort d’Amulius, ayant rétabli le calme dans la ville, Romulus et Rémus ne voulurent ni demeurer à Albe sans y régner, ni régner du vivant de leur aïeul. Après avoir remis Numitor sur le trône, et rendu à leur mère les honneurs qui lui étaient dus, ils résolurent d’aller s’établir ailleurs, et de bâtir une ville dans le lieu même où ils avaient été nourris. Ils ne pouvaient donner un prétexte plus honnête pour quitter Albe ; mais peut-être était-ce pour eux un parti nécessaire. Comme ils n’avaient que des troupes de bannis et d’esclaves fugitifs, il fallait ou que leur puissance fût entièrement détruite si ces troupes venaient à se débander, ou qu’ils aillent habiter avec elles dans une autre ville ; car les Albains n’avaient voulu ni s’allier avec ces bannis et ces esclaves, ni les admettre au nombre des citoyens. Une première preuve de ce refus, c’est l’enlèvement des Sabines que ces mêmes hommes ravirent non pour