Page:Plutarque - Vies, traduction Ricard, 1829, tome 15.djvu/207

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armes, sans un seul vaisseau armé, sans un soldat, enfin sans une seule ville qui fût dans leurs intérêts ; et après un espace de temps assez court, ils se trouvaient réunis, à la tête d'une flotte puissante, d'une infanterie et d'une cavalerie nombreuses, avec de l'argent pour les entretenir ; et ils étaient en état de disputer, les armes à la main, l'empire à leurs ennemis.

29. Cassius désirait de rendre à Brutus autant d'honneur qu'il en recevait de lui ; mais Brutus, par égard pour sou âge et pour la faiblesse de son tempérament, qui ne pouvait pas soutenir la fatigue, le prévenait presque toujours, et allait le plus souvent chez lui. Cassius avait la réputation d'être un grand homme de guerre : mais il était violent, et ne savait gouverner que par la crainte ; avec ses amis il aimait à railler, et se livrait trop à la plaisanterie. Brutus, aimé du peuple pour sa vertu, chéri de ses amis, admiré de tous les gens honnêtes, n'était pas haï même de ses ennemis. Il devait cette affection générale à son extrême douceur, à une élévation d'esprit peu commune, à une fermeté d'âme qui le rendait supérieur à la colère, à l'avarice et à la volupté. Toujours droit dans ses jugements, inflexible dans son attachement à tout ce qui était juste et honnête, il se concilia surtout la bienveillance et l'estime publiques,