Page:Plutarque - Vies, traduction Ricard, 1829, tome 3.djvu/87

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et la modération sont donc le parti le plus sage.

[7] VIII. La gloire d’une conquête qui avait rendu Camille maître d’une ville rivale de Rome, dont le siége avait duré dix ans, ou les louanges de ceux qui le félicitaient de sa victoire, lui avaient sans doute enflé le cœur, et inspiré des sentiments trop hauts pour le magistrat d’une république dont il devait respecter les usages ; car il mit trop de faste et de fierté dans son triomphe, et entra dans Rome monté sur un char tiré par quatre chevaux blancs ; ce qu’aucun général n’avait fait ayant lui, et ce qu’aucun ne fit depuis ; car les Romains regardent cette sorte de char comme sacrée, et la croient réservée pour le souverain et le maître des dieux : ce fut une première cause du mécontentement des citoyens, qui n’étaient pas accoutumés à ce faste insultant. Ils en eurent bientôt une seconde dans son opposition à la loi qui ordonnait le partage de la ville. Les tribuns du peuple avaient proposé qu’on séparât en deux portions égales le sénat et le peuple ; qu’une moitié restât à Rome, et que l’autre, à la décision du sort, allât habiter la ville nouvellement conquise. Ils donnaient pour motif de ce partage que les uns et les autres en seraient plus riches ; que, possesseurs de deux grandes et belles villes, ils conserveraient