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Page:Plutarque - Vies, traduction Ricard, 1829, tome 3.djvu/96

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ne pouvant supporter l’idée d’une telle injustice, et n’écoutant que son ressentiment, prend la résolution de quitter la ville et de s’en aller volontairement en exil. Il embrasse sa femme et son fils, sort de sa maison, et marche en silence jusqu’aux portes de la ville. Là, il s’arrête, et s’étant retourné, les mains étendues vers le Capitole, il prie les dieux que si c’est contre toute justice, et par la violence ou l’envie du peuple qu’il est forcé de quitter ignominieusement sa patrie, les Romains s’en repentent bientôt, et que tout l’univers reconnaisse le besoin qu’ils auront eu de lui, et les regrets que leur aura causés son absence.

[13] XV. Après avoir, comme Achille, prononcé contre ses concitoyens ces imprécations terribles, il s’éloigna de Rome. Il fut condamné par contumace à une amende de quinze mille as, qui, réduits à la valeur de l’argent, font quinze cents drachmes ; l’as étant une petite monnaie d’argent dont dix font un denier. Il n’est pas un Romain qui ne soit persuadé que les malédictions de Camille furent promptement suivies de leur effet, et qu’elles attirèrent sur Rome, en punition de cette injustice, la vengeance céleste, vengeance dont Camille lui-même dut être vivement affligé, mais qui fut aussi honorable qu’éclatante : tant le courroux des dieux accabla tout à coup Rome, et fit