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CATON.

les uns des autres. Caton seul laissait voir ouvertement qu’il lui était suspect, et il l’évitait avec soin. Quelqu’un lui ayant dit qu’Eumène était un bon prince et fort ami des Romains : « Soit, répondit-il ; mais un roi est par nature un animal vorace ; et aucun des rois les plus vantés ne peut être comparé à Épaminondas, à Périclès, à Thémistocle, à Manius Curius, ni même à Amilcar, surnommé Barca. » Il disait que ses ennemis lui portaient envie, parce qu’il se levait toutes les nuits, et que, négligeant ses propres affaires, il s’occupait de celles de la république ; qu’il aimait mieux perdre la récompense du bien qu’il faisait, que de n’être pas puni du mal qu’il aurait fait ; qu’indulgent pour les fautes d’autrui, il ne se pardonnait jamais les siennes.

XIII. Les Romains avaient choisi pour aller en Bithynie trois ambassadeurs, dont l’un était goutteux, l’autre avait un vide dans le crâne, par une suite du trépan, et le troisième passait pour fou. Caton dit, en plaisantant, que les Romains envoyaient une ambassade qui n’avait ni pieds, ni tête, ni cœur. L’affaire des bannis d’Achaïe était fort agitée dans le sénat : les uns voulaient les renvoyer dans leur patrie, les autres s’y opposaient ; Caton, que Scipion, à la prière de Polybe, avait voulu l’intéresser en fa-