Page:Plutarque - Vies, traduction Ricard, 1829, tome 9.djvu/110

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pour lui la même considération quand il aurait auprès de sa personne un aussi grand capitaine que Marius, soit qu’il craignit que Marius, qui, dans la victoire, n’était pas maître de sa colère, et passait toujours les bornes de la justice, ne causât, par ses cruautés, la ruine entière de leur parti. Il leur représentait qu’avec la supériorité qu’ils venaient d’acquérir, il leur restait peu de chose à faire ; que si Marius était reçu dans leur armée, il aurait seul l’honneur du succès, et attirerait à lui tout le pouvoir « Vous savez, ajouta-t-il, qu’il ne souffre pas aisément le partage, et qu’il ne se pique pas de fidélité. » Cinna convint de la justesse de ses raisons ; mais il lui avoua qu’après avoir lui-même appelé Marius pour venir partager la conduite de cette guerre, il avait honte de le rejeter, et n’en voyait pas même le moyen. « Je croyais, reprit Sertorius, que Marius était venu de lui-même en Italie ; et dans cette idée, je vous donnais le conseil qui me paraissait le plus utile. Mais puisqu’il n’est venu que sur votre invitation, vous n’avez pas dû même en délibérer. Il ne vous reste plus d’autre parti que de le recevoir, et de tirer de lui tout le secours que vous pourrez. La bonne foi ne permet plus aucun raisonnement. »

VI. Cinna fit donc venir Marius, et toutes les troupes furent divisées en trois corps, qui eurent