Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 1.djvu/219

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cheval, ou qui avaient trois cents médimnes : on les nommait les Chevaliers. Ceux qui possédaient deux cents médimnes en grains et en liquides composèrent la troisième classe, sous le nom de Zeugites[1]. Tous les autres, dont le revenu était au-dessous de deux cents, furent appelés Thètes[2].

Solon interdit aux Thètes l’entrée des magistratures, et il ne leur donna d’autre part aux affaires que le droit de voter dans les assemblées, et dans les jugements, droit qui ne parut rien d’abord, mais qui, dans la suite, devint très-considérable ; car la plupart des procès finissaient par retomber sous la juridiction populaire. Si c’étaient généralement les magistrats qui commençaient par en connaître, on pouvait toujours en appeler au peuple, de la sentence des magistrats. D’ailleurs, l’obscurité des lois de Solon, et les sens contradictoires qu’elles présentaient souvent, servirent beaucoup, dit-on, à accroître l’autorité des tribunaux. Comme on ne pouvait pas décider les différends par le texte même des lois, on avait toujours besoin de juges, à qui l’on portât en dernier ressort la décision des procès. Les juges se trouvaient, par là, les maîtres des lois, pour ainsi dire. Solon caractérise ainsi lui-même cette compensation qu’il avait établie entre les riches et les pauvres :

J’ai donné au peuple le pouvoir qui suffisait,
Sans rien retrancher à ses honneurs, sans y rien mettre de trop.
Quant aux puissants, aux hommes fiers de leur opulence,
Je ne leur ai point permis l’injustice.
J’ai armé chaque parti d’un invincible bouclier :
Ni l’un ni l’autre ne peuvent plus s’opprimer jamais.

Afin de donner un nouveau soutien à la faiblesse du peuple, il permit au premier venu de prendre la défense

  1. On fait venir ce nom de ζυγός, joug. C’est comme qui dirait des hommes en état d’avoir des bêtes de somme.
  2. Nous avons déjà dit que ce mot signifie mercenaires.