Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 1.djvu/407

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qu’Anthémocrite serait enterré près des portes Thriasiennes, aujourd’hui nommées le Dipyle[1].

Les Mégariens repoussent avec énergie l’inculpation de la mort d’Anthémocrite, et ils rejettent les causes de la guerre sur Périclès et Aspasie. Ils se fondent sur ces vers des Acharniens[2], qui sont si connus et si populaires :

Des jeunes gens vont à Mégare : ils s’enivrent en jouant au cottabe[3] ;
Ils enlèvent la courtisane Simétha.
Bientôt les Mégariens, en proie à une douleur extrême,
Enlèvent à leur tour deux des courtisanes d’Aspasie.

Il n’est donc pas facile d’assigner la véritable cause de la guerre ; mais tous les écrivains s’accordent à dire que Périclès empêcha seul qu’on révoquât le décret. Les uns, cependant, attribuent son opiniâtreté à sa grandeur d’âme, et à la justesse de son esprit pénétrant, qui lui montrait les vrais intérêts de son pays, et qui lui faisait voir, dans l’insistance de Lacédémone sur ce point, l’intention d’essayer si Athènes céderait, et, dans la condescendance d’Athènes, l’aveu apparent de sa faiblesse. Suivant les autres, c’est plutôt par pur amour-propre, et pour faire montre de sa force, qu’il affecta de mépriser les sommations de Lacédémone. Mais, de toutes les causes qu’on attribue à cette guerre, celle où il y a le plus de mauvaises passions en jeu, et celle aussi pour laquelle se réunissent le plus de témoignages, est racontée à peu près comme il suit.

Le sculpteur Phidias s’était chargé, comme nous l’avons dit, de faire la statue de Minerve. Il était l’ami de

  1. Ce mot signifie double porte. Le Dipyle menait à Éleusis et à Mégare : on en voit encore les ruines.
  2. Comédie d’Aristophane que nous possédons. Voyez vers 624 et suivants.
  3. Jeu qui consistait à jeter de haut et avec bruit quelques gouttes de vin dans de petits vases placés sur de l’eau, et à les y faire enfoncer.