Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 1.djvu/61

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que, s’il gagnait, Hercule lui accorderait une grâce à son choix, et que, s’il perdait, il donnerait au dieu un festin splendide, et lui amènerait une belle femme pour coucher avec lui. L’arrangement fait, il jette les dés, d’abord pour Hercule, ensuite pour lui, et il perd manifestement la partie. Pour tenir sa parole et remplir ses engagements, il dresse au dieu un repas magnifique, et il fait venir, en payant, Larentia, qui était dans toute sa jeunesse, et peu renommée encore. Le lit du festin était dressé dans le temple. Le repas fini, il y enferma Larentia, pour que le dieu jouît de ses faveurs. On dit qu’en effet Hercule posséda la femme, et qu’il lui ordonna d’aller dès le matin sur la place, d’embrasser le premier homme qu’elle rencontrerait, et d’en faire son ami. Le premier qu’elle rencontra fut un citoyen déjà vieux et fort riche, qui avait passé jusque-là sa vie dans le célibat : il se nommait Tarrutius. Il fit bon accueil à Larentia, et il s’attacha tellement à elle, qu’en mourant il lui laissa des biens considérables, dont elle donna, par testament, la plus grande partie au peuple romain. Elle avait déjà un nom célèbre, dit-on, et on l’honorait comme l’amie d’un dieu, lorsqu’elle disparut tout à coup, près du lieu où était enterrée la première Larentia. C’est aujourd’hui le Vélabre : ce nom vient de ce que, le Tibre étant sujet à se déborder, on traversait en bateau dans cet endroit, pour se rendre au Forum ; manière de passer l’eau qui s’appelle velatura[1]. Il y en a qui disent que ceux qui donnaient des jeux au peuple faisaient tendre de toiles les rues qui mènent de la place au Cirque, à commencer par cet endroit-là : or, les Romains donnent à une toile le nom de velum. Telle est l’origine des honneurs qu’on rend, chez les Romains, à la seconde Larentia.

Faustulus, porcher d’Amulius, éleva les deux enfants chez lui, à l’insu de tout le monde. Quelques-uns néan-

  1. Du mot velum, voile.