Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 1.djvu/68

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ait vie ; il ne touche pas aux oiseaux, même morts, et il respecte en eux son espèce : différent en cela des aigles, des hiboux et des éperviers, qui attaquent et déchirent tout vivants les oiseaux mêmes. Or, comme dit Eschyle :

L’oiseau qui a mangé un oiseau peut-il être pur[1] ?

D’ailleurs, les autres oiseaux passent, pour ainsi dire, leur vie sous nos yeux ; partout ils s’offrent d’eux-mêmes à nous : tandis que c’est chose rare que l’apparition d’un vautour. L’on sait aussi combien il est difficile de trouver leurs aires. Cette rareté a donné quelque crédit à l’absurde opinion que les vautours viennent chez nous par immigration, et qu’ils sortent de quelques autres contrées : ainsi font-ils, du reste, dans les cas surnaturels où il s’agit, au jugement des devins, non du cours ordinaire des choses, mais de la volonté des dieux se manifestant par des signes visibles.

Romus, en apprenant qu’il avait été trompé, ressentit un violent chagrin : aussi, pendant que Romulus faisait creuser le fossé qui devait entourer les murailles, il le raillait sur son ouvrage, et il en entravait l’exécution ; et il en vint jusqu’à sauter le fossé. Il fut tué sur-le-champ, par Romulus en personne, disent les uns, et, selon d’autres, par Celer, un des amis de Romulus. Faustulus périt lui-même dans le combat, ainsi que Plistinus : Plistinus était son frère, et l’avait, dit-on, aidé à élever Romulus. Celer s’enfuit en Étrurie : c’est de son nom que les Romains ont appelé célères les gens prompts et légers. Ils surnommèrent ainsi Quintus Métellus, parce qu’il avait donné, fort peu de jours après la mort de son père, un combat de gladiateurs : c’était l’expression de l’étonnement qu’avait causé la rapidité des préparatifs.

Romulus, après avoir enterré Romus et ses deux nourriciers dans le Rémonium, s’occupa de bâtir la ville.

  1. Vers tiré d’une pièce aujourd’hui perdue.