Page:Plutarque - Vies des hommes illustres, Charpentier, 1853, Tome 2.djvu/231

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condamnation, se tua lui-même au pied du tribunal ; il y a plusieurs traits semblables qu’ils rapportent avec soin et dans le plus grand détail. Ils n’ont pas oublié le bannissement d’Aristide ; mais nulle part ils ne disent rien de cette condamnation.

D’ailleurs, on montre encore aujourd’hui à Phalère son tombeau, qui fut, dit-on, construit aux frais de la ville, parce qu’il n’avait pas laissé de quoi payer les dépenses de ses funérailles. On raconte aussi que le Prytanée dota ses filles, la ville s’étant chargée de leur mariage et leur ayant donné à chacune trois mille drachmes[1]. Le peuple fit don à son fils Lysimachus de cent mines d’argent[2], d’autant de plèthres[3] de terre plantés d’arbres, et enfin de quatre drachmes[4] par jour. C’est Alcibiade qui avait proposé le décret. Lysimachus laissa en mourant une fille nommée Polycrite : le peuple, au rapport de Callisthène, lui assigna, pour son entretien, la même somme qu’aux vainqueurs des jeux olympiques. Démétrius de Phalère, Hiéronyme de Rhodes, Aristoxène le musicien, et Aristote, si l’on doit ranger parmi les écrits authentiques d’Aristote le livre sur la noblesse, rapportent que Myrto, petite-fille d’Aristide, fut mariée au sage Socrate, quoiqu’il eût déjà une autre femme ; il aurait pris cette seconde, qui était veuve, parce que son extrême pauvreté l’empêchait de trouver un autre mari. Mais Panétius les a suffisamment réfutés dans sa Vie de Socrate. Démétrius de Phalère dit encore, dans son Socrate, qu’il se souvient d’avoir vu un Lysimachus, descendu de la fille d’Aristide, réduit à une telle pauvreté, qu’il gagnait sa vie, près du temple de Bacchus, à ex-

  1. Environ deux mille sept cents francs de notre monnaie.
  2. Environ neuf mille francs.
  3. Le plèthre était une mesure équivalente à dix ares environ.
  4. Environ trois francs soixante-quinze centimes de notre monnaie.